Les 8 et 9 mars derniers, en la basilique Saint-Sernin, un programme musical exceptionnel a réuni les chœurs de la Schola Cantorum, sous les directions de Jean Persil et Clarisse Chantelot, ainsi que le titulaire du grand orgue Cavaillé-Coll, Michel Bouvard, pour l’exécution de deux messes de Requiem dont celle de Maurice Duruflé.
La création d’un ensemble vocal d’exception à la basilique Saint-Sernin a vu le jour afin de doter ce magnifique édifice d’un chœur exigeant, satisfaisant les paroissiens lors des offices et les amateurs de musique grâce à l’organisation de concerts. La Schola Cantorum de la basilique Saint-Sernin, fondée par Jean Persil et Mathieu Duboc, regroupe aujourd’hui une centaine de chanteurs, cinq chefs et quatre chœurs spécifiques.
Après avoir enregistré un très bel album CD consacré au Requiem de Gabriel Fauré et autres pièces sacrées, la Schola Cantorum abordait, lors de ces deux concerts des 8 et 9 mars, l’autre grande messe française de Requiem, celle de Maurice Duruflé. Et pas seulement !
Présenté par Jean Persil lui-même, le programme choisi illustre, en quelque sorte, la démarche du compositeur. Il existe de la messe des morts de Maurice Duruflé, achevée en 1947 et dédiée à la mémoire de son père, trois versions : la première, chronologiquement, est écrite pour grand orchestre, la deuxième pour orgue, suivant de peu la précédente, et la troisième, terminée en 1961, pour un orchestre d’effectif plus réduit. La version avec orgue a donc été choisie pour ces deux concerts. Cette composition emblématique est marquée par l’influence profonde du chant grégorien.
La première partie du concert est alors très légitimement consacrée à des extraits du Requiem grégorien. Son exécution par le Chœur grégorien, l’un des ensembles spécifiques de la Schola Cantorum dirigé par Clarisse Chantelot, magnifie ce chant a cappella et à l’unisson. La succession des ordinaires de la messe s’effectue dans le respect du type modal et diatonique de cette musique. Du Requiem aeternam au Chorus angelicum, le démarche sera la même dans la messe de Duruflé. Ce « chant des siècles », comme il est parfois qualifié, installe une atmosphère hypnotique que les chanteurs génèrent sur le souffle. Comme un moment d’éternité.
Le Requiem de Duruflé est ensuite chanté par le Grand chœur de la Schola Cantorum dirigé par Jean Persil. Au-delà de la différence de style, l’esprit prolonge celui du chant grégorien. L’intervention de l’orgue, magnifique Cavaillé-Coll joué par Michel Bouvard, apporte un somptueux soutien aux voix, à la manière d’un grand orchestre symphonique. La ferveur du chant, le sens de la dynamique, la richesse des timbres vocaux et instrumentaux confèrent à cette exécution une intensité chaleureuse. A deux reprises le Grand chœur est rejoint par un groupe de jeunes chanteuses de la Maîtrise de la basilique, l’un des chœurs spécifiques de la Schola Cantorum. Le Domine Jesu et le Sanctus, d’une part, puis le Libera me et In paradisum, bénéficient de cette fraîcheur vocale. A côté de la poésie de certains épisodes, l’éclat, l’ampleur sonore, la puissance expressive de l’orgue et du chant atteignent parfois des paroxysmes impressionnants. En outre, le Pie Jesu, comme dans le Requiem de Gabriel Fauré, est confié à la voix soliste. Ici la mezzo-soprano Flora Kerhoas, du haut de la tribune de l’orgue, emplit la nef de son chant sensible et intense.
D’une manière générale, félicitons l’ensemble des chanteurs pour la qualité de la prononciation et le bel équilibre entre les divers registres.
L’accueil du public, particulièrement chaleureux, obtient un bis étonnant. Il s’agit de la toute dernière œuvre de Maurice Duruflé, un Notre Père, recueilli et émouvant. Une belle conclusion qui laisse espérer de nouvelles rencontres avec cette phalange vocale ainsi d’autres ensembles invités. Ce sera le cas le jeudi 14 mars à 19 h en la basilique Saint-Sernin qui recevra la Maîtrise et Petits Chanteur de Laval (Québec). Le 20 avril à 20 h en la chapelle des Carmélites, la Schola Cantorum présentera Via Crucis, une œuvre de Franz Liszt pour clavier et voix.
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Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse
Schola Cantorum de la basilique Saint-Sernin