Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
Le Vent de Victor Sjöström
Non, il n’y a pas qu’Ingmar Bergman au Panthéon des grands cinéastes suédois de renommée mondiale. La preuve avec Victor Sjöström (1879-1960) que l’on retrouvera d’ailleurs devant la caméra de Bergman en 1957 dans le rôle principal des Fraises sauvages. Bien avant cela, Sjöström fut l’un des maîtres du cinéma muet avec La Charrette fantôme (1921), La Lettre écarlate (1926) ou Le Vent (1928), son œuvre la plus célèbre. A l’instar d’autres immenses réalisateurs européens de son temps, le Suédois a cédé aux sirènes d’Hollywood et dirige pour la seconde fois, dans cette adaptation d’une nouvelle de Dorothy Scarborough, Lilian Gish, l’égérie de David Wark Griffith.
Au XIXème siècle, une jeune femme, Letty Mason, quitte sa Virginie natale pour rejoindre son cousin en Arizona. Dans le train, un entreprenant voyageur de commerce, Whit Roddy, l’avertit : elle va découvrir un pays sauvage où le vent peut rendre fou, en particulier les femmes… Chez son cousin, Letty se heurte à la jalousie de la femme de celui-ci qui va bientôt la contraindre à quitter la maison familiale. Une seule issue pour celle qui est sans ressources : se marier.
Emprise maléfique
Mélodrame amoureux aux allures de western, Le Vent marie huis-clos et grands espaces, naturalisme et expressionnisme au cœur d’une nature et d’éléments hostiles, oppressants, inquiétants, presque surnaturels. Evidemment, l’un des protagonistes essentiels du film est ce vent, manière de démiurge à l’emprise maléfique. Tout n’est que bourrasques, tempêtes, tourbillons, rafales. Le sable et la poussière recouvrent tout, jusqu’aux humains. Filmée comme un animal pris au piège, Letty – magistrale Lilian Gish – se débat, affronte ses prétendants, se soumet, se révolte. L’innocence de son visage contredit la violence des actes et du désir.
L’image d’un cheval galopant au ralenti dans les nuages apporte une touche onirique dans cette peinture réaliste d’un envoûtement. La Metro-Goldwyn-Mayer imposa un happy end (relatif) à Sjöström. Il n’en demeure pas moins que Le Vent laisse un goût de cendres.
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