18e édition du Festival de Rocamadour du 15 au 26 août
Après Migrations en 2022, c’est sous le signe de la Fraternité qu’a été placé le 18e Festival de Rocamadour, du 15 au 26 août. Chaque année, des centaines de milliers de touristes et pèlerins venus des quatre coins du monde se croisent dans la cité mariale lotoise, site chargé d’histoire et fortement marqué par la présence du sacré. Rocamadour est aussi le lieu de rencontre des artistes français et européens qui participent depuis 17 ans au festival, unis par un même amour de la musique, le langage universel par excellence. Ce lien fraternel, transcendant toutes les origines, est célébré par l’édition 2023 et sa programmation.
L’ensemble La Sportelle en ouverture le 15 août
L’honneur d’ouvrir la 18e édition le 15 août à 21 h à la basilique Saint-Sauveur revient à La Sportelle, la formation associée au festival, qui mène de nombreux projets artistiques et actions de médiation autour de Rocamadour et dont l’activité en concert se développe désormais sur la totalité du territoire national. En ce jour de l’Assomption, les huit chanteurs de l’ensemble sont accompagnés à l’orgue par Emmeran Rollin dans un joli programme de musique sacrée Bach/Mendelssohn, deux compositeurs de génie liés par le fait que le second a beaucoup contribué à la redécouverte de l’oeuvre du premier.
Trois soirées dans la vallée de l’Alzou pour conclure le festival 2023
Les concerts en plein air dans la vallée de l’Alzou sont maintenant des rendez-vous bien installés dans la programmation du festival. L’an passé, quatre se sont déroulés au pied de l’incroyable décor qu’offre la cité illuminée au crépuscule. L’expérience est prolongée à la fin de l’édition 2023, la vallée étant le théâtre des trois derniers concerts avec des artistes et des programmes à la démesure de ce cadre majestueux.
Le 24 août à 20 h 30, un habitué des lieux, le violoniste Renaud Capuçon, est présent au festival pour la cinquième fois consécutive. Celui qui avait donné le premier concert dans la vallée de l’Alzou en 2019 revient avec l’Orchestre de Chambre de Lausanne, prestigieuse phalange dont il assure la direction musicale et artistique depuis deux ans. Le programme est intégralement dédié à Ludwig Van Beethoven : les Romance pour violon et orchestre n°1, op. 40 et Romance pour violon et orchestre n°2, op. 50 puis la Symphonie n°1, op. 21 et enfin le fameux Triple concerto en do majeur, op. 56 pour lequel se joindra à l’orchestre le Trio Zeliha formé par Manon Galy (violon), Maxime Quennesson (violoncelle) et Jorge Gonzalez Buajasan (piano).
Le 25 août, toujours à 20 h 30, l’Orchestre de la Garde Républicaine donne un premier concert dans la vallée sous la direction du colonel Sébastien Billard. Une seule œuvre au programme, le magnifique et célèbre Requiem de Guiseppe Verdi, monument de la musique chorale sacrée servi pour l’occasion par le choeur basque espagnol Orfeón Donostiarra et les chanteurs solistes Vannina Santoni (soprano), Marie-Andrée Bouchard-Lesieur (alto), Thomas Bettinger (ténor) et Nicolas Cavallier (basse). Une grande première à Rocamadour.
On retrouve le lendemain l’Orchestre de la Garde Républicaine dirigé par Sébastien Billard lors du troisième concert au pied de la Cité en clôture du festival, le 26 août à 20 h 30. Pour rendre hommage à Sergueï Rachmaninov, dont on fête les 150 ans de la naissance et commémore le 80e anniversaire de la mort en 2023, l’ensemble symphonique de l’Armée française accompagne la pianiste Lise de la Salle dans le très beau Concerto n°2 du grand compositeur russe. Un tube du répertoire pour piano suivi par un autre tube, la Symphonie n°9 dite « Du Nouveau Monde » d’Antonin Dvorák pour clore en beauté la soirée et le festival.
Quatre autres concerts à la basilique Saint-Sauveur
Si plusieurs soirées de cette 18e édition sont délocalisées hors de Rocamadour, la basilique Saint-Sauveur reste le centre et le point de ralliement du festival. Coeur historique de la Cité, lieu d’exposition de la Vierge noire dans la chapelle qui lui est dédiée, l’édifice du XIIe siècle offre de surcroît une acoustique remarquable dont il serait dommage de se priver.
Après la soirée d’ouverture le 15, il faut attendre le 19 août pour y assister à un 2e concert. L’ensemble Les Accents, fondé et dirigé par le violoniste Thibault Noally, se produit à 21 h avec un programme intitulé Rome 1700 aussi original qu’alléchant. S’y succèdent des pièces vocales et instrumentales d’Alessandro Scarlatti (le père de Domenico), Antonio Caldara et le Gloria de Georg Friedrich Haendel. Autre attrait de ce concert, et pas le moindre, la présence du chanteur brésilien Bruno de Sá dont l’exceptionnelle voix de sopraniste s’annonce d’ores et déjà comme l’une des grandes attractions du festival 2023.
C’est une tradition voulue par Emmeran Rollin, directeur artistique de la manifestation, un récital de piano est donné chaque année à la basilique. Anniversaire Rachmaninov oblige, il était naturel de proposer un programme entièrement dédié au compositeur russe. Quel meilleur interprète que Nikolaï Lugansky pouvait-on trouver pour cet hommage à son illustre compatriote ? Grand spécialiste de l’oeuvre de son aîné à qui il a consacré de nombreux enregistrements, Lugansky joue le 20 août à 21 h les Six Moments Musicaux op. 16, la Sonate pour piano n°2 op. 36 et les Neuf Études-Tableaux op. 39.
Deux jours après Les Accents, un autre orchestre français sur instruments d’époque est en concert à la basilique le 21 août à 21 h. L’ensemble Correspondances, sous la direction de son fondateur, le claveciniste et organiste Sébastien Daucé, y présente un programme intitulé Membra Jesu nostri en référence au titre d’un cycle de sept cantates de Dietrich Buxtehude sur la Passion du Christ. Une pièce d’Heinrich Schütz, Die mit Tränen, est également au menu de cette soirée honorant deux maîtres du baroque allemand, Buxtehude et Schütz ayant ouvert la voie à Jean-Sébastien Bach.
Dernier concert à la basilique le 23 août à 21 h pour une quatrième première en ce lieu et au festival, celle de l’ensemble Les Talents Lyriques lui aussi dirigé par son fondateur, le claveciniste Christophe Rousset. Deux grands compositeurs de la période baroque, Marc-Antoine Charpentier et Claudio Monteverdi, se répondent dans le programme Ave Maris Stella, titre d’un hymne composé par le premier en hommage à la Vierge Marie ; « Étoile de la mer » prenant un sens bien particulier dans la basilique qui abrite la Vierge noire de Rocamadour, protectrice des marins en péril. Lors de cette soirée où sont jouées également deux sonates de Dario Castello, les musiciens des Talents Lyriques accompagnent les sopranos Marie Lys et Judith Van Wanroij.
Deux concerts à l’abbatiale de Souillac
La belle et spacieuse abbatiale de Souillac est devenue depuis quelques années l’un des ports d’attache du festival dans le nord lotois et un écrin de choix pour la grande musique chorale. Le Tenebrae Choir de Nigel Short y a donné l’an passé un superbe concert resté dans les mémoires de ceux qui ont eu la chance d’y assister. Autant de raisons de faire revenir l’impressionnant ensemble vocal britannique au même endroit, le 17 août à 21 h. Le programme Russians Treasures est inattendu mais moins qu’il n’y paraît puisque constitué de nombreuses œuvres chorales de Rachmaninov, dont Les Vêpres et Liturgie de Saint Jean Chrysostome, auxquelles s’ajoutent des pièces d’autres compositeurs russes (Tchaïkovski, Chesnokov, Golovanov, Glinka, Sheremetiev, Kalinnikov, Kedrov).
L’abbatiale Sainte-Marie est aussi le lieu d’expression idéal pour les fameux concerts spatialisés de La Tempête, formation une nouvelle fois programmée cette année. Une invitation dont se réjouiront les habitués du festival tant les précédentes prestations de la compagnie fondée et dirigée par Simon-Pierre Bestion ont été de grands succès publics et d’indéniables réussites artistiques. Après Les Vêpres à la Vierge de Claudio Monteverdi en 2022, La Tempête propose le 22 août à 21 h La Bomba Flamenca, création scénique et musicale imaginée à partir de la fausse cérémonie que Charles Quint avait organisée pour ses propres funérailles. À quoi cela peut-il ressembler ? Musicalement, à des pièces françaises, espagnoles, arabo-andalouses et chrétiennes mozarabes composées entre le XIIe et le XVIe siècle. Quant à l’aspect visuel et scénique, il faudra y être pour le savoir… Un conseil, réservez vite vos places !
Deux nouveaux lieux de concerts « hors les murs » en soirée
Le concert « hors les murs » n’est pas une nouveauté en soirée au Festival de Rocamadour si l’on songe à ceux des années précédentes à l’abbatiale de Souillac ou dans les jardins du Château de La Treyne à Lacave. L’édition 2023 marque cependant un virage dans cet aspect de la programmation puisque de nouveaux lieux, plus ou moins éloignés de la Cité mariale, y font leur apparition. Dès le 16 août à 21 h, le joli village médiéval de Martel accueille les Gesualdo Six, autre ensemble britannique régulièrement encensé par la critique, en l’église Saint-Maur avec le programme Fading, titre d’un CD qu’a fait paraître le sextuor vocal début 2020. Une formation à découvrir de toute urgence pour ceux qui ne la connaissent pas encore, au fil d’un vaste voyage a cappella allant d’Hildegard von Bingen aux compositeurs baltes contemporains en passant par les grands classiques de la Renaissance anglaise et espagnole.
Plus à l’est du département, l’église Sainte-Spérie de Saint-Céré reçoit le 18 août à 21 h le choeur Les éléments. Un retour au Festival de Rocamadour pour l’ensemble vocal dirigé par Joël Suhubiette, alors que se termine la saison du 25e anniversaire de sa création. Une seule pièce au menu du concert, la délicieuse Petite messe solennelle de Gioachino Rossini, sorte d’incongruité dans l’oeuvre du compositeur italien au milieu de ses innombrables opéras.
« Est-ce bien de la musique sacrée que je viens de faire, ou bien de la sacrée musique ? J’étais né pour l’opéra buffa, tu le sais bien ! Peu de science, un peu de cœur, tout est là. » Gioachino Rossini, postface de la Petite messe solennelle.
Et d’autres nouveautés pour égayer la programmation en journée et en fin de soirée…
Le Festival de Rocamadour, ce n’est pas que les grands concerts en soirée mais aussi d’autres propositions dans la journée ou à 23 h. Les trois premières dates de l’édition 2023 sont à ce titre particulièrement riches, grâce à de nouvelles venues dans la programmation, Les Itinérantes. Un trio vocal féminin formé par Manon Cousin, Pauline Langlois de Swarte et Élodie Pont, trois chanteuses issues de traditions musicales différentes (jazz, chanson française, musique ancienne et musique du monde) dont l’improbable rencontre il y a six ans a donné naissance à un répertoire a cappella couvrant onze styles musicaux et neuf siècles, le tout en plus de quarante langues différentes.
Invité pour la première fois au festival, le groupe propose deux programmes dès le 15 août. D’abord à 16 h au château de la Treyne à Lacave avec « Au fil de l’air », un tour du monde en musique à travers les époques et les styles, du Moyen Âge à nos jours, puis à 23 h sur le Chemin de Croix de Rocamadour avec « De la Terre vers le Ciel », une balade sur fond de musique sacrée allant de la polyphonie médiévale aux compositions d’aujourd’hui en passant par quelques airs traditionnels.
Les Itinérantes sont de nouveau sur le pont le lendemain à 16 h en l’église de Loubressac avec le programme « Terra Mater » dédié à la figure de la Vierge Marie mais aussi à la nature, à la Terre et aux femmes. Le soir du 16 août à 23 h, sur le site du Dolmen de Magès, concert sous les étoiles avec « L’Heure du songe », nouveau voyage vocal du Moyen Âge à nos jours, d’Hildegard von Bingen aux Andrew Sisters en passant par des compositeurs de la scène internationale actuelle.
Le 17 août pour la dernière journée du trio au festival, « Terra Mater » est repris à 16 h au Prieuré de Carennac avant une Bodega sous les étoiles à partir de 19 h 30 au Château de Haute-Serre suivie de « L’Heure du songe » à la nuit tombée.
L’Ensemble Oriscus, fondé par la chanteuse et pianiste Anne Bertin-Hugault, est l’un des fils rouges de cette 18e édition en donnant chaque soir à 18 h, du 16 au 24 août (relâche le 18), un concert « Abendmusik » de trente minutes à la chapelle du Grand Couvent à Gramat. Popularisés par Buxtehude en Allemagne au XVIIe siècle, les Abendmusik consistent en de brefs concerts de fin de journée durant le temps de l’Avent. Une tradition que reprend le quatuor de femmes d’Oriscus en proposant des musiques du soir dans l’esprit des veillées musicales du temps de l’Assomption. Quatre programmes sont présentés en alternance au public : « Mystères lumineux », « Mystères joyeux », « Mystères glorieux » et « Mystères douloureux ».
Second fil rouge du festival 2023, pas nouveau celui-ci, le Moment d’orgue à la basilique Saint-Sauveur chaque jour à 12 h. Il a été confié à Quentin du Verdier, multiple lauréat de nombreux concours internationaux et nommé « jeune organiste de l’année » par l’ECHO, association regroupant des orgues historiques d’Europe. À cette occasion, le jeune organiste jouera des pièces extraites de son album Aux origines de l’orgue français paru sous le Label Rocamadour – Musique sacrée en avril dernier.
Deux sessions du stage d’été pendant le festival
Comme lors des éditions 2021 et 2022, le stage d’été Cantica Cacra propose deux sessions distinctes en 2023. Il s’adresse aussi bien à ceux qui veulent s’initier au chant choral qu’aux choristes souhaitant se perfectionner, et peut accueillir jusqu’à 60 stagiaires encadrés par des musiciens et enseignants professionnels. Première session du 12 au 18 août avec un programme intitulé « Inspiration Requiem » conçu et dirigé par Bertrand Richou autour d’extraits du Requiem de Michael Haydn, du Messie de Haendel, et de la Messe des Morts de Gossec.
La seconde session a lieu du 19 au 25 août sur la thématique « Douce Vierge Marie » proposée par l’ensemble La Sportelle et encadrée par Laetitia Corcelle et Jean-Philippe Billman. Ces deux sessions se concluent par des concerts de fin de stage à la basilique Saint-Sauveur (les 18 et 25 août à 16h, entrée libre).
Forte du succès croissant des précédentes éditions, l’équipe du Festival de Rocamadour a étoffé encore un peu plus la programmation du millésime 2023 pour offrir au public et aux très nombreux touristes de la région des propositions musicales originales et de qualité à tous les moments de la journée. L’intégration de nouveaux lieux de concerts montre aussi sa volonté d’inscrire l’événement au cœur d’un véritable projet culturel de territoire, partagé sur l’ensemble du département du Lot. En toute fraternité.
Bon festival !