Depuis le 18 novembre 2022, POM TV a officiellement rejoint le paysage de l’audiovisuel. La chaîne de télévision propose ses programmes à volonté sur sa plateforme en ligne et en direct deux heures par jour. Les programmes en question sont des œuvres de création : fictions, documentaires, spectacles vivants… Le tout conçu et réalisé en Occitanie ! Culture 31 a rencontré Sonia Paramo, présidente de POM TV, ainsi que Pascal Bonnet, producteur et membre de l’équipe.
Culture 31 : POM, c’est Pyrénées Occitanie Méditerranée. Vous avez d’ailleurs une forte identité locale puisque tous vos programmes sont conçus dans la région. Pourquoi cet ancrage local était si important pour vous ?
Sonia Paramo : Depuis la crise sanitaire, le panorama français de la télévision a beaucoup changé. Beaucoup de producteurs et de chaînes de télévision se sont un peu recentrés sur eux-mêmes. C’est notamment ce qui est arrivé sur Paris. C’est-à-dire que des sociétés comme France Télévisions ou Arte fonctionnent beaucoup avec des producteurs proches d’eux. D’une part pour avoir la sécurité de la trésorerie, et pour un tas de raisons qui leurs sont propres. Et il est vrai que depuis 2020, c’est devenu plus difficile pour les producteurs de région de travailler avec les grandes chaînes nationales. On y arrive encore, mais ça s’est beaucoup restreint.
Le projet de POM TV, on l’avait depuis très longtemps en région et quand la crise est arrivée, on s’est dit que c’était vraiment le moment de démarrer ce projet. Donc on a rassemblé une dizaine de producteurs de toute la région Occitanie et on a décidé de créer une SCOP (Société coopérative d’intérêt collectif, ndlr). Une identité forte, parce qu’effectivement, le travail des producteurs régionaux est aussi excellent que ce qui se fait ailleurs. On a eu l’idée de créer cette télévision pour continuer de travailler, pour continuer de créer tous ensemble : producteurs, auteurs, réalisateurs, techniciens, comédiens, artistes… Et on se rend compte, trois ans après que ça marche ! Donc on a eu raison et on veut créer ici, en région Occitanie, ce qu’on a appelé « le petit Arte du Sud ».
Qu’est ce qui fait de l’Occitanie une région référence en terme de création audiovisuelle ?
Pascal Bonnet : Il y a déjà un socle de producteurs qui est là depuis assez longtemps. Des producteurs qui font du documentaire, de la fiction, du spectacle vivant et de la re-création de spectacle vivant. Depuis le milieu des années 90, il y a quand même pas mal de producteurs qui travaillent ici. C’est aussi une terre riche parce qu’il y a des auteurs, des réalisateurs, beaucoup de techniciens aussi. Donc effectivement, on a un terreau qui est très fertile. Puis des histoires, c’est universel, il y a des histoires partout autour de nous.
Vous coproduisez certains formats proposés sur la chaîne. Avez-vous une anecdote liée à la production de l’un de ces programmes ?
Pascal Bonnet : Il y a un film de Marc Khanne , « La vie de tempête », qui est en salle et qui fait 1h30 et des poussières, et que nous diffusons aujourd’hui en format série. Parce que la chaîne de télévision que nous proposons se prête à ce genre d’exercice. Découper un film en dix, en douze, en quinze… Ça fait des formats courts et aujourd’hui, soit on peut trouver le format long, pour les adultes par exemple, qui ont le temps de regarder, etc. Soit, pour les jeunes qui sont un peu plus pris et qui vont chercher des contenus plus courts, un format en épisodes. On essaie de s’adapter aux différents types de consommation de l’image, tout en restant une chaîne de création.
Quels sont vos programmes coup de cœur ce mois-ci ?
Sonia Paramo : Nous avons « Les Veilleurs de Tourbières », réalisé par Pascale Fossat, qui est un film sur l’environnement. Il nous montre une autre façon de parler de l’écologie, donc je trouve ça très intéressant. Nous avons également un film qui s’appelle « Widmung », qui rapporte un concert filmé en République Tchèque, par un ensemble de la région Occitanie. Il y a aussi un film en noir et blanc de la cinémathèque, puisque la cinémathèque est partenaire de POM TV. Il s’appelle « La Vota ». C’est un petit film qui nous fait faire une promenade dans les gorges du Tarn.
Il y a beaucoup de coups de cœur et nous avons aussi deux derniers films qui ont été apportés par la société OME, qui sont « Pyrénéistes » et « Pirineistas » qui racontent l’histoire du pyrénéisme d’un point de vue masculin et d’un point de vue féminin.
Vous avez parlé de partenaire. La plateforme étant gratuite, comment vous financez-vous ?
Sonia Paramo : Nous tous qui travaillons ici sommes bénévoles, hormis les techniciens qui s’occupent du serveur, qui sont rémunérés. Au bureau, nous sommes bénévoles. Nous avons un travail à côté. Concernant le financement des films, nous allons chercher des partenaires privés et publics ainsi que des mécènes qui apportent de l’argent à POM TV. Et cet argent est redistribué dans des coproductions. Pas dans toutes, dans certaines, c’est fléché. On va aussi donner des petits coups de pouces sur certaines productions : 800 euros sur tel film, 1000 euros sur un autre, et ça peut être beaucoup plus sur un autre film.
Nous avons par ailleurs du matériel à POM TV, ici à Toulouse, à Montpellier, et nous allons ouvrir un nouveau bureau en septembre à Millau. Nous aurons là aussi du matériel. Donc nous sommes à même d’apporter du matériel. Par exemple, un court-métrage de fiction est en train de se terminer. Hier, la productrice m’a appelée et m’a dit qu’ils étaient un peu dans la pagaille et avaient besoin d’une nouvelle aide de notre part, et je lui ai proposé d’apporter l’étalonnage en plus de ce que nous avions déjà apporté.
Vous souhaitez travailler de manière écoresponsable et inclusive. Dans les faits, comment cela se traduit-il ?
Sonia Paramo : Il y a parmi nos adhérents et nos associés, l’association La Mécano. Elle s’occupe de culture et handicap. Dans ce sens, on essaie aussi de travailler avec plusieurs entités. Par exemple, la société des Films Figures Libres va faire des captations L’Offrande Musicale à Tarbes. Ce sont des concerts qui sont faits à l’attention des publics en position de handicap. Les captations vont être diffusées dans les hôpitaux, dans les EHPAD ou dans des centres accueillant des personnes avec des problèmes handicapants. J’ai également une personne qui est venue me voir via La Mécano et qui propose de s’occuper du serveur et de l’étalonnage pour nous. C’est en cours aussi. L’inclusion, c’est les femmes, les hommes, les personnes handicapées… C’est tout le monde.
Pascal Bonnet : Depuis la semaine dernière, il y a également un film qui est en audiodescription sur POM TV et qui s’appelle « L’herbier, des pétales aux pixels ».
Globalement, à quel public s’adresse POM TV ?
Pascal Bonnet : Un public qui va rechercher des films qui ont un message, des fictions, des spectacles qu’ils n’auront pas pu aller voir… Des amateurs de programmes culturels essentiellement. On est vraiment axés sur la création. Nous ne sommes pas en concurrence avec les autres chaînes de télévision puisque France 3 Occitanie diffuse un ou deux documentaires par semaine et ViàOccitanie à peu près autant. On n’est pas du tout sur la même proposition. D’ailleurs, on a des partenariats avec ViàOccitanie pour des coproductions, en tant que deuxième diffuseur voire troisième diffuseur. POM TV n’est pas forcément le diffuseur principal.
Sonia Paramo : On fait beaucoup de coproductions avec d’autres chaînes de télévision et nous sommes très vigilants sur les droits. Si France Télévisions apporte un film, on le diffusera sur POM TV un an après. On fait attention à ne pas faire de la concurrence déloyale. On est très vigilants sur la chronologie des médias.
Une phrase pour convaincre ce panel de découvrir vos programmes ?
Sonia Paramo : Je vais vous dire une phrase qu’une de nos associées, Hélène Morsly, a dite : « On en a rêvé, on l’a fait ».
Pascal Bonnet : On s’inscrit dans le patrimoine et dans la pérennité régionale, dans une histoire régionale puisque les films que l’on a produit il y a 10-20-30 ans ou même un an, on va les retrouver sur POM TV durablement. D’habitude un film passe une fois à la télévision et part sur une étagère. Notre but à nous d’exposer durablement la production régionale et pas qu’en région, car on peut voir notre chaîne partout dans le monde.
Pour les convaincus, rendez-vous sur pom.tv
Propos recueillis par Inès Desnot