L’opera buffa est en quatre actes dans une mise en scène et une scénographie de Marco Arturo Marelli dont les qualités ont déjà fait leurs preuves et ravi le public lors de sa création dès fin 2008 puis il y a six ans en ce Théâtre. Et c’est Hervé Niquet qui dirige le tout, ici les musiciens de l’Orchestre national du Capitole et les membres du Chœur de l’Opéra national du Capitole sous l’autorité de leur Chef Gabriel Bourgoin. Les Noces de Figaro, six représentations à partir du 20 janvier 2023.
« Comme chef-d’œuvre de pure tendresse et de mélancolie, absolument exempt de tout mélange importun de majesté et de tragique, rien au monde ne peut être comparé aux Nozze di Figaro. »
Ainsi s’exprimait en 1814, Stendhal, l’un des premiers français à avoir compris toute l’importance du génie du divin Wolfgang Amadeus Mozart. Plus de deux siècles plus tard, rien n’est venu lui donner tort et cet opéra Le Nozze est toujours cet incomparable miracle de tendresse et de mélancolie, l’un des opéras parmi les plus parfaitement écrits. Ce fut l’œuvre d’un compositeur de trente ans, en pleine possession de ses moyens, et à qui la fortune fit rencontrer le librettiste idéalement apparié, un certain Lorenzo da Ponte, aventurier vénitien, prêtre déchu, libertin, ami de Casanova, qui, après avoir créer la fameuse trilogie Les Nozze di Figaro (1786), Don Giovanni (1787), et Cosi fan tutte (1790), fut obligé de se faire très discret car doué pour un certain type de malversations. Le “loustic“ traversera même l’Atlantique, direction New-York et finira par donner des cours à la fameuse Colombia University de New-York, pour mourir à …89 ans ! Joli parcours.
La collaboration Mozart / da Ponte fut pratiquement unique dans l’histoire de la musique. Une trilogie avec trois réussites, les trois réinsufflant à l’opéra une humanité, une vérité des passions, une connaissance des âmes qui firent que plus aucun ouvrage ne sera comme avant. On est subjugué par la manière qu’a eu le librettiste de s’appuyer sur le texte du Le Mariage de Figaro de Beaumarchais pour en faire jaillir tout le côté le moins grivois mais bien le plus humain. Dans cet hymne à l’espièglerie et à l’intelligence, rempart à toute forme d’oppression, Les Noces de Figaro célèbrent l’amour en explorant tous ses subterfuges. On est certain que Mozart a fortement participé dans ce choix.
Et c’est parti pour Une Folle journée dans cet opera buffa bien peu traditionnel car, si les scènes et les situations sont typiques du genre, l’esprit qui anime l’ouvrage comporte une gravité et une profondeur nouvelles grâce à da Ponte, et à Mozart. « . L’intrigue, drôle entre toutes, est menée tambour battant et s’enrichit de péripéties qui servent à la perfection, l’équilibre des quatre actes. Mais derrière l’humour et le piquant des situations, ici la colère de Figaro, là l’arrogance du Comte, ailleurs la malice de Susanne ou la mélancolie de la Comtesse, Mozart sonde les âmes et les cœurs et verse une indicible nostalgie sur ces jeux de l’amour et du hasard ; c’est Mozart, le véritable dramaturge de ses Noces, glissant, dans une narration lumineuse, des airs qui se transforment en duos, des duos en trios, des trios en tutti, avec une invention mélodique vertigineuse, toujours jaillissante et renouvelée. Un opéra qui porte bien son nom de Folle journée, rythmé par la grâce, profond comme la vie, universel comme sait l’être Mozart. » Mais si cet opera buffa est de lignée moins traditionnelle, la production elle, défie le temps par son classicisme louable, et son bon goût, louable ! décors et costumes et lumières compris. Créée en 2007 à Lausanne, régulièrement reprise, c’est une réussite totale.
Résumé
Rappelez-vous Le Barbier de Séville de Rossini. Et le Comte Almaviva qui est tombé sous le charme de Rosina. Ici, nous sommes près de Séville, au Château d’Aguas-Frescas, à la fin du XVIIIe siècle. Figaro, c’est le baryton-basse Julien Véronèse et Suzanne, c’est la soprano Anaïs Constans. Respectivement, valet et camériste du Comte et de la Comtesse Almaviva, ils sont en pleins préparatifs de noces. Mais leur joie de convoler risque d’être ternie par les audaces du Comte, prêt à tout pour séduire la future mariée. Le Comte est chanté par le baryton Michael Nagy et la Comtesse par la mezzo-soprano Karine Deshayes.
Aidés de la Comtesse, elle-même délaissée par son époux volage, Figaro et Suzanne devront faire preuve d’imagination pour déjouer les pièges d’Almaviva, éviter les chausse-trapes sournoises d’une Marcellina, plus très jeune mais qui veut épouser Figaro, un contrat passé pour effacer une dette d’argent du dit Figaro. Ingrid Perruche chante et joue le rôle de la gouvernante de Bartolo. Dans cette vile tâche, elle sera fort aidée par Don Bartolo lui-même, médecin de Séville, chanté par la basse Frédéric Caron.
Mais il y a encore, le jeune page enflammé, Cherubino, troublé par ses émois amoureux, haï des hommes et aimé des femmes et accumulant les maladresses. C’est la mezzo-soprano Léonore Pancrazi, autrefois Orsini dans Lucrece Borgia. Pour achever le tableau le maître de musique paraît indispensable. C’est Don Basile interprété par le ténor Emiliano Gonzales Toro, un habitué du Théâtre du Capitole. Autre ténor, Pierre-Emmanuel Roubet dans le rôle du juge. Manque Antoine, le jardinier du comte et oncle de Suzanne, la basse ??
Rythmée par d’incroyables quiproquos, qui glissent en clin d’œil vers d’indicibles instants de mélancolie, la Folle Journée verra s’abattre les masques un à un et mettre à nu la vérité des cœurs.
Acte 1 (voir au-dessus)
Le Comte Almaviva va-t-il finalement exercer son droit de cuissage sur la future mariée ?. On n’oublie pas Chérubino qui a surpris le Comte Almaviva en train de faire la cour à Suzanne. Afin de l’éloigner, Almaviva décide de l’envoyer à l’armée. Figaro ironise sur la nouvelle mission du petit page.
Acte II : On est ici en plein opera buffa avec la machination mise au point par Figaro. Pour détourner le Comte de Suzanne, Figaro a échafaudé un plan : dans un billet, il lui fera croire que la Comtesse, son épouse tristement délaissée, doit rencontrer un amant fictif le soir même. Quant au rendez-vous que le Comte a fixé à Suzanne au jardin, c’est Chérubin vêtu en femme qui prendra sa place ! Soupirs de Chérubin.
Acte III : Les imbroglios se multiplient, prière de suivre : Suzanne et la Comtesse ont réussi à se jouer du Comte, et ce dernier n’y a vu que du feu quand Chérubin, caché dans la chambre de la Comtesse, s’est sauvé en sautant par la fenêtre. Mais depuis ses plates-bandes, le jardinier Antonio a tout vu – ou du moins semble le croire. Le voici qui court rapporter la scène à son maitre. Difficile pour Figaro, qui a raté un épisode, de ne pas enchainer les bévues devant Almaviva. Marcellina, Bartholo et Basile surviennent et comptent bien profiter de la situation pour régler leurs comptes avec Figaro. La plus grande confusion règne. Bénéficiant de caractères individuels plus forts voire complexes, ce sont bien les femmes qui tirent les ficelles.
Le Comte rumine sa vengeance. A-t-il été joué ou non ? Suzanne, qui a pourtant accepté son rendez-vous, lui cache t-elle quelque chose ? Et dire qu’il ne peut même plus jeter Marcellina dans les bras de Figaro ! Car par un incroyable coup de théâtre, la matrone se révèle être la mère de Figaro ! De son côté, la Comtesse chante sa nostalgie des jours heureux (la Rosina est bien devenue sage !)
Acte 4 : Ce dernier acte voit apparaître un ultime personnage, la fille du jardinier, mais oui ! Barbarina. C’est pour la soprano Caroline Jestaedt. Difficile de résister à l’analyse qu’en fait Christophe Ghristi, et que je me dois de citer : « Dans Le Nozze, la vérité des sentiments n’est jamais équivoque. Elle est toujours multiple et contradictoire, comme l’est la vie elle-même. Ouvrant cet Acte IV, Barbarina cherche l’épingle perdue : un air bref, quelques mots seulement, mais une déploration d’une mélancolie presque insoutenable. En considérant son objet, l’on ne peut être qu’étonné de la disproportion. Mais, au fait, Barbarina ne nomme pas ce qu’elle a perdu et ce pourquoi elle se lamente. Sa virginité ? la chose n’est que trop évidente et trop simple. Mais le vert paradis des amours enfantines plus encore, la légèreté, l’insouciance : à la porte du jardin, la voici elle aussi à la porte de l’inextricable labyrinthe du désir. »
La nuit, le jardin du château est le rendez vous des incertitudes et des faux-semblants : Suzanne tromperait-elle son Figaro ? Non, bien sûr, Figaro ignore tout simplement ce que Suzanne et la Comtesse ont manigancé pour confondre le Comte. D’ailleurs, celui-ci est pris à son propre piège, et lorsqu’il croit surprendre son épouse en flagrant délit d’adultère, c’est lui qui doit implorer le pardon final – dans l’élan le plus tendre et lumineux jamais écrit par Mozart. Les noces de Figaro et Suzanne auront bien lieu – l’allégresse générale finale en est la promesse.
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