L’univers des ventes aux enchères est un milieu bien passionnant et notre jeune et récent commissaire-priseur Guillaume Suduca ne pourra affirmer le contraire, bien au contraire ! Dans sa prochaine vente du vendredi 4 novembre à 14h 30……dans les locaux du Crédit municipal de Toulouse, il compte bien créer l’événement en dispersant, entre autres, de très jolis lots de courriers, tous de la plume du marquis de Lafayette. De nombreux collectionneurs français et bien sûr américains sauront leur faire le meilleur sort.
Il faut reconnaître le caractère passablement émouvant de ces feuilles couvertes d’une écriture tracée à la plume trempée dans l’encre noire, l’écriture de Marie Joseph Gilbert du Mortier, marquis de Lafayette, lettres adressées à son ami, l’encyclopédiste et homme politique ariégeois, toulousain, député et avocat, Jean-Pierre Pagès. On n’épiloguera pas ni n’irons jusqu’à comparer avec nos vibrants SMS !! Quant à leur contenu, sur la vie du Général Lafayette, ce dernier fascine littéralement. On remarque que l’amitié entre les deux hommes n’était pas connue jusqu’à présent. Ces lettres arrivent donc fort à propos et rendent encore plus passionnante la vie du bonhomme.
Il faut se replonger dans l’époque, et oublier les aéroports. Comment ne pas s’imaginer sur le quai au Havre, et applaudir les voyageurs prenant place sur le Cadmus ? – L.A.S. « L.F. », adressée à Mme Charles Philibert de Lasteyrie [Le Havre], 13 juillet [1824, marque pos-tale]. 1 p. in-8. Feuillet double, adresse au verso du second feuillet, marques postales. C’est la dernière expédition du Général.
Belle lettre de Lafayette, rédigée le jour de son départ pour les États-Unis, depuis Le Havre.
Récit de « cette bonne matinée du 13 », durant laquelle il fut « comblé de bonheur de tous les côtés », par son amie, l’écossaise Fanny Wright (1795-1852), future citoyenne américaine, libre-penseur, féministe et abolitionniste fervente et la sœur de cette dernière, Camilla. Toutes deux accompagnèrent Lafayette au États-Unis lors de sa tournée héroïque des États fédérés « Les deux chères Fanny et Camilla ne peuvent pas manquer de venir aux États-Unis []. Ma bien aimée Fanny n’a pas été difficile à persuader ; Camilla a été charmante ; il ne lui reste plus rien sur le cœur ». Il évoque ensuite le départ : « Nous sommes comblés ici de témoignages de bienveillance », « Nous sommes accompagnés jusqu’au vaisseau, plus loin même en la rade si les autorités ne s’y opposent pas ». Il mentionne sa « chère Virginie », son « excellent Pagès », Fer-nand, l’époux de sa correspondante : Charles Philibert de Lasteyrie du Saillant (1759-1849), agronome, philanthrope et lithographes français, vice-président du Comité central franco-polonais, groupe présidé par son ami La Fayette, etc
Sur le Cadmus, il écrit : « 30 juillet : Exceptionnelle lettre de Lafayette, incapable d’écrire à cause du mal de mer : « J’aurais bien voulu vous embrasser encore une fois avant de partir, mon cher Pagès []. Nous sommes sur un excellent bâtiment [le Cadmus] parfaitement commandé, et nous y voyageons avec plaisir et mélange de discipline, de zèle, de douceur et de bonnes manières qui conviennent aux marins d’un pays vraiment libre, mais quelques soins qu’on ait de nous, cela ne préserve pas du mal de mer et j’en ai plus fort et plus longtemps souffert que dans la traversée de ma jeunesse… »
Arrivée (seulement !!) le dimanche 15 août à 4 heures du matin……(ce qui, paraît-il a pu contrarier quelques passagers car ils ratent la messe !! Et puis, ce n’est pas un courrier par jour, mais cela peut être deux ou plusieurs : fascinant vous dis-je.
La rénovation importante d’une bâtisse toulousaine a permis à Guillaume Suduca de sauver certains éléments de vitraux que l’on retrouve ici. En effet, plusieurs lots concernent des rondels, noms donnés à ces créations dans l’art du vitrail. Depuis longtemps, déjà les vitraux ne sont plus l’exclusivité des édifices religieux. Ils se sont invités par exemple dans les bâtiments haussmaniens ou autres du XIXè où sont aménagés des puits de lumière. Bâtiments publics ou particuliers car ils présentent l’avantage de la luminosité tout en masquant l’intérieur. Ces rondels sont des éléments de vitrail, certains comportant des parties datant de plusieurs siècles. Avec un vitrail, le jeu de la lumière et des couleurs peut être fascinant, et vu d’une infinité de façons. On peut s’approprier le vitrail et retrouver le travail de l’artiste qui l’a conçu et voyager avec lui.
Un lot superbe avec ces deux moutons en émaux cloisonnés, absolument ravissants et conséquents puisque 43 cm de haut, reposant chacun sur une terrasse en émaux polychromes à décors de fleurs de lotus et rinceaux feuillagés. Ils ont été expertisés comme relevant d’un travail chinois de la fin de l’époque Qing.
On pourra être surpris par la longévité extraordinaire de ce peintre belge, Joseph Albert, mort à 96 ans en 1981 qui nous laisse des natures mortes et scènes champêtres d’excellente facture dont cette huile sur carton représentant ce bouquet de fleurs, richement coloré. Image poétique, la nature morte est toujours un enjeu pour l’artiste-peintre : peindre la lumière. La preuve est ici évidente. De plus, et ce n’est pas négligeable, l’œuvre est fort bien encadrée.
Faut-il présenter Dora Maar (1907-1997), (Henriette Théodora Markovitch, dite) celle qui fut la compagne de Pablo Picasso, photographiant par le menu la création alors de Guernica en 1936-37 et de qui Guillaume Suduca présente plusieurs compositions dont celle-ci, bleu nuit, un feutre et lavis sur papier, tampon de la vente de l’atelier en 1998, en bas à droite, monogramme au dos, en 23.5 x 32 cm. Des compositions comme balayées de nuages et de vent, comme sa maison provençale, son refuge alors, révélant avec force la lutte d’une artiste aux prises avec les fantômes, nombreux, de son passé. Et réalisées bien après sa rupture salutaire qui lui permit d’exister par sa peinture.
On en profite pour signaler et vous inviter aussi à la vente qui aura lieu la veille soit, le Jeudi 3 novembre, 14h 30 dite Militaria avec toujours des objets absolument surprenants comme cette collection de lance-fusées avec des spécimens allemands et japonais, mais encore quelques soldats de plomb “napoléoniens“, et, cela va de soi, épées, sabres et autres armes, certaines fort originales, des souvenirs historiques. Tous les lots ont été expertisés par Gilles Sigro-Peyrousere.
Suduca • Commissaire-Priseur
2 rue du Languedoc • Toulouse
Tel : 05 61 29 79 88
Facebook • Instagram