Chaque mercredi, on rend hommage à un grand classique du cinéma. A voir ou à revoir.
Gilda de Charles Vidor
Vamp, femme fatale, sex-symbol : Rita Hayworth est tout cela dans Gilda qui fit d’elle une actrice mythique et qui demeure son film le plus important avec La Dame de Shanghai d’Orson Welles. Ce film sorti en 1946, servi par la magnifique photographie en noir et blanc du grand Rudolph Maté, repose presque tout entier sur la performance et le charisme de son actrice. Derrière la caméra : Charles Vidor, un solide artisan – qui n’a pas le talent de son homonyme King Vidor – dont le principal mérite est d’avoir fait tourner Hayworth dans The Lady in Question en 1940 et La Reine de Broadway en 1944 avec Gene Kelly. Devant la caméra : Glenn Ford, George Macready et donc celle qui entra dans la légende avec la scène d’anthologie où elle chante la très sulfureuse Put the Blame on Mame en portant une robe fourreau de satin noir dévoilant ses épaules et de très longs gants dont le dénudement constitue un sommet érotique.
Avant ce « vrai-faux » striptease, Gilda raconte la constitution d’un triangle amoureux. Dans une rue sordide de Buenos Aires, un joueur professionnel américain de bas étage, Johnny Farrell, est sauvé d’une agression par l’un de ses compatriotes qui lui conseille d’exercer ses talents dans un casino voisin. Farrell s’y rend et découvre que son sauveur est le propriétaire du casino, Ballin Mundson. Ce dernier l’engage comme homme de confiance. Au retour d’un voyage d’affaires, Mundson présente à Farrell la femme qu’il vient d’épouser, Gilda, celle-là même qui précipita sa déchéance…
Désir et passion
Amour, amitié, fidélité, haine, jalousie, vengeance, frustration, sexe, voyeurisme, homosexualité refoulée (entre Mundson et Farrell scellant leur amitié autour d’une canne-épée ô combien symbolique) sont les ingrédients qui vont unir cet étrange trio. Si Gilda emprunte les atours du film noir autant dans le folklore (la police surveille le casino où des individus louches et de mystérieux Allemands grenouillent) qu’au gré d’une histoire de trafic de tungstène, il ne parle que de passion amoureuse et de désir mimétique.
Ainsi, quand Mundson passe pour mort (il a organisé un faux suicide), Farrell épouse Gilda, mais pour lui faire respecter la fidélité qu’elle ne témoigna pas envers son ancien mari. Gardien de la mémoire d’un défunt, il ne peut « consommer » physiquement l’amour qu’il porte à la femme de sa vie. Séductrice, libre et prisonnière à la fois, cynique et romantique, sincère et manipulatrice, émouvante, objet de fantasme, beauté inaccessible et femme facile : Rita Hayworth incarne toutes les facettes de son personnage avec brio. Il n’est pas interdit de voir dans ces traits quelques correspondances avec la propre vie, tumultueuse et tragique, de l’actrice.
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