Une édition bien particulière encore pour cette année bousculée, et le terme est faible. Les fondateurs, Catherine d’Argoubet et Paul-Arnaud Pejouan, ont redoublé d’énergie pour faire en sorte que 2021 soit une année comme une autre, et que la musique au piano résonne toujours en septembre pratiquement au quotidien.
Elisabeth Leonskaja © Marco Borggreve
Ce seront bien 13 récitals donnés au Cloître des Jacobins à 20h. Une édition qui place au premier plan des artistes surtout de la jeune génération : toute un symbole ! Cette grande respiration, ce souffle de jeunesse, se situent d’ailleurs pleinement dans la philosophie qui a présidé à la fondation de cette manifestation. Dès l’origine, en effet, le Festival a su témoigner sa confiance à des artistes promis au plus bel avenir. Les citer serait construire une liste fort longue illustrée de noms maintenant prestigieux dans l’art pianistique.
Alexandre Kantorow © Sasha Gusov
En premier, même si cela peut contredire mon “intro“ ! honneur à une figure tutélaire du Festival, j’ai nommé l’iconique Elizabeth Leonskaja qu’on ne présente plus, l’anti-diva baptisée en son temps « la grande dame de l’Ecole Soviétique ». C’est pour le vendredi 24 septembre. Elle nous donnera, entre autres, son approche de ce monument de l’écriture pour piano que constitue l’œuvre de jeunesse de Johannes Brahms, la Sonate n°3. Après l’avoir entendu en juin par une jeune gloire, le dénommé Daniil Trifonov, ce sera rebelote avec une valeur montante irrésistible, le mardi 14, le jeune Alexandre Kantorow. Piano aux Jacobins avait eu beaucoup de flair en l’invitant, disons adolescent, dans un programme Bartok, Brahms et Liszt, il y a cinq ans.
Tom Borrow © Michael Pavie
Même si les dates sont moins nombreuses cette année, la programmation se révèle toujours un atout de choix par son parfait équilibre entre les piliers que représentent certains compositeurs incontournables, et des moins connus du public. Et cela va jusqu’au choix des œuvres, certaines se devant d’être régulièrement au rendez-vous et d’autres étant livrées à l’esprit de découverte de l’auditoire. On ne sera donc pas étonné de retrouver le vendredi 10 sous les doigts d’un jeunot, l’israélien Tom Borrow, la très facile Sonate n°6 de Serge Prokofiev, qui vient après Chopin et Chostakovitch, mais oui !
Célimène Daudet © Christophe Brelet
Autre programme très ambitieux, celui de la franco-haïtienne, née à Aix, Célimène Daudet, le mercredi 15, avec des œuvres de Liszt, Scriabine et Frank. On est impatient de découvrir celle que l’on décrit comme “tout feu , tout flamme“ devant son clavier.
Marie-Ange Nguci © Natacha Colmez
Quant à Marie-Ange Nguci, elle vous confie : « Une œuvre vit par son détail, mais aussi par son souffle. ». Jeune et brillante pianiste, polyglotte, elle a aussi étudié la direction d’orchestre et joue de l’orgue…ou des ondes Martenot. Une véritable touche-à-tout dans le domaine musical qui vous le prouve encore avec son programme captivant dans lequel on remarque Scriabine, Froberger, Beethoven, Ravel et Rachmaninov. Ce sera le lundi 20.
Matan Porat © Peter Hönnemann
Le mercredi 22, c’est Matan Porat, interprète atypique, et le mot est faible ! Certains ont peut-être assisté à son récital des œuvres pour piano du dénommé Moondog, ou bien à celui où il jouait douze œuvres de douze compositeurs différents. Pour cette cuvée 2021, ce pianiste et compositeur, passionné de musique de chambre et aussi par les arts de la scène, a choisi comme thème le Carnaval op.9 de Robert Schumann, qu’il va agrémenter de pages de divers compositeurs autres, de Couperin à Stockhausen, une bonne douzaine. Une originalité qui peut se révéler enthousiasmante.
Varduhi Yeritsyan © Charlotte Bommelaer
Si Scriabine vous captive, cap sur le mardi 21. La pianiste Varduhi Yeritsyan est une fan de la musique pianistique du maître russe qu’elle va faire dialoguer avec celle d’un Franz Liszt, ou quand la Sonate “Messe noire“ de l’un va rencontrer les Murmures de la forêt de l’autre, ou encore une Ronde des lutins peut-être en quelque Bord de source. Une démarche toute empreinte de poésie et pleine de surprises.
Poésie et surprise toujours avec le rendez-vous auquel nous convie le jeudi 23 le pianiste-interprète découvreur Nathanaël Gouin qui souhaite rendre plus familier à certains amateurs du piano des noms comme Pierné, ou Vierne ou Bauer moins connus assurément que Frank ou Mendelssohn ou Fauré. On souscrit à la tentative.
Nathanael Gouin © Hani Kanaftchian
Incontestablement, Nathanaël Gouin est de plus en plus à la lumière. Le tout jeune pianiste et violoniste, mais qui a dû finalement abandonner l’archet, figure comme l’une des voix les plus originales ayant émergé sur la scène musicale de ces dernières années. Féru de musique de chambre, il a été encensé pour son interprétation de la musique pour piano d’un autre français, un certain Georges Bizet à propos duquel il a confié : « C’est un défi inouï de faire chanter un piano ».
Vadym Kholodenko © Jean Baptiste Millot
Avec Vadym Kholodenko, le jeudi 9, c’est le retour vers les steppes des grandes plaines d’Ukraine. Le pianiste trentenaire est de notoriété telle qu’elle lui permet de fréquenter toutes les grandes scènes internationales accueillant la musique classique pianistique, avec un faible pour les compositeurs russes. Parmi eux, on retrouve ici Rachmaninov qui voisinera avec Bach et Beethoven. Et n’oublions pas qu’il fut Lauréat en 2014, d’un des prix les plus prestigieux, vainqueur du Concours van Cliburn.
Emmanuel Christien © Caroline Wyatt
Quant à Emmanuel Christien, l’éclectisme de son programme du jeudi 16 va nous permettre de découvrir plusieurs facettes de son art pianistique puisqu’il nous promène de Haydn à Debussy en passant par le monument beethovénien que constitue la fameuse Waldstein ou, un Nocturne de Chopin et la sublime Ballade n°3. On n’oublie pas deux pièces de Sévérac, La fontaine de Chopin et Les naïades et le faune indiscret, toutes deux citées car si rares dans un récital ! C’est aussi un passionné de musique de chambre.
Simone Dinnerstein © Lisa Marie Mazzucco
Enfin, c’est la pianiste américaine Simone Dinnerstein qui ouvre le Festival le mercredi 8 avec des contrastes incontestables puisque son clavier nous conduira de Couperin à Phil Glass en passant par Schumann et Satie et en terminant par un morceau de choix, les Kriesleriana de …Robert Schumann. Pianiste de renommée internationale, elle a bien sûr joué dans les salles les plus prestigieuses du monde entier mais, femme très déterminée, elle a joué aussi dans des lieux qualifiés de moins conventionnels comme hôpitaux, maisons de retraite, écoles, institutions pénitentiaires pour femmes,…
Dan Tepfer © Josh Goleman
Ce Festival ne peut se construire sans des pianistes de jazz et ce seront deux “Carte blanche“ confiées à Dan Tepfer le samedi 11 et Shai Maestro Solo le vendredi 17, deux pianistes qui ont hésité et hésitent sûrement encore entre le piano classique et le piano jazz. Le premier, né à Paris de parents américains semblent s’être complètement immergé dans l’océan pianistique du jazz. Sa version jazzifiée des Variations Goldberg de Bach prouve surtout sa passion immodérée pour…la musique, tout simplement.
Shai Maestro Solo © Gabriel Baharlia
Quant au second, né en Israël, il réside actuellement à New York et vient régulièrement une partie de l’année sur Paris. Aussi compositeur, il gagne la reconnaissance de ses pairs et celle des médias, et se produit régulièrement avec les meilleurs artistes de jazz, étant reconnu comme un des plus talentueux pianistes de sa génération Pour ma part, j’aurai le plaisir de découvrir pour la première fois les deux grâce à Piano aux Jacobins.
Célia Oneto Bensaid © Capucine De Chocqueuse
Un seul récital hors Cloître à Altigone-Saint-Orens, le dimanche 26 attention ! à 16h, avec la pianiste Célia Oneto Bensaid qui va nous balader entre Maurice Ravel, Camille Pépin, jeune compositrice française et Phil Glass.