La Fine fleur, un film de Pierre Pinaud
La culture de la rose, un monde pas si bisounours que cela. C’est ce que nous montre Pierre Pinaud dans ce film extraordinairement émouvant et plein d’enseignements sur cette spécialité horticole en fait très française.
De nos jours, dans une ferme horticole dédiée à la culture et à la création des roses. Eve en est devenue propriétaire au décès de son père, avec le seul soutien de Vera, son assistante. Ses méthodes ancestrales ont du mal à affronter les groupes industriels qui pratiquent à outrance et selon des méthodes écologiquement peu orthodoxes la culture intensive de la plus belle fleur du monde. Eve est au bord de la faillite. Vera trouve une solution momentanée cependant. Elle signe un accord avec la DDASS pour embaucher, à peu de frais, des ouvriers en insertion : Fred, Samir et Nadège. Ils n’ont qu’une connaissance réduite de cette culture. Doux euphémisme. Mais contre mauvaise fortune… D’autant qu’un énorme rosiériste veut s’emparer de ce petit domaine, une façon comme une autre de mettre la main sur quelques-uns des trésors horticoles qu’elle recèle. Malgré plusieurs propositions, Eve résiste mais sait son temps compté si elle n’arrive pas à mettre la main sur les précieux pistils et autres étamines qui lui permettraient de créer une nouvelle rose. Elle sait où ils se trouvent, gardés dans une serre qui ressemble à un coffre-fort. Elle s’ouvre du problème aux trois « cassos » qu’elle vient d’embaucher. La discussion va donner lieu à un drôle de marchandage… Et nous voilà embarqués dans un thriller pas vraiment à l’eau de rose mais terriblement efficace.
Pierre Pinaud connaît bien ce monde de l’horticulture et les méandres nauséeux qu’il contient, business oblige. Mais là n’est pas le seul sujet, car le cinéaste, coscénariste de ce film, glisse de manière virtuose au cœur de son histoire de roses la vie de Fred, jeune homme abandonné qui a forcément mal tourné et qui se révèle être un nez exceptionnel. Superbement incarné par Melan Omerta, ce Parisien qui a grandi à Toulouse où il se fait connaître comme graffeur et rappeur, fait ici ses premiers pas à l’écran, un écran qu’il crève littéralement grâce à un charisme incroyable. Et pourtant il y a de la concurrence sévère ici avec rien moins que l’immense Catherine Frot (Eve), toujours aussi magistrale, juste de ton, d’une vertigineuse précision. Leur présence conjointe nous vaut des séquences mémorables dont certaines vous noueront la gorge assurément. Sur une BO sublime de Mathieu Lamboley (mais qui en aurait douté !), ce film vous prend par la main pour une comédie à suspense, subtilement rythmée, profondément émouvante et qui, certainement, vous en apprendra beaucoup sur un monde floral assez…surprenant !
À l’affiche dans votre cinéma : Véo Muret – Gaumont Toulouse Wilson – CGR Toulouse Blagnac – Gaumont Labège – Kinepolis Fenouillet
Pierre Pinaud – L’envol, enfin ?
Ce natif de Montauban passe par l’Ecole nationale supérieure Louis Lumière (1990-1992) avant de réaliser, à 28 ans, son premier court-métrage en 1997. Ce format va être le début d’une longue série jusqu’en 2008, date de sortie de « Les Miettes », César du Meilleur court métrage en 2009. Son premier long (Parlez-moi de vous) suivra en janvier 2012, un film dans lequel Pierre Pinaud réunit Karine Viard et Nicolas Duvauchelle. En 2020, il dédie la comédie sous rubrique à la mémoire de sa mère, horticultrice. Il serait temps que la profession prenne en compte un réalisateur aussi sensible et doué !