Compte rendu concert. Toulouse. Théâtre du Capitole, le 2 Juin 2021. Frantz Schubert (1797-1828) : Die Schöene Müllerin D. 795 ; Cycle de Lieder sur des poèmes de Wilhelm Müller ; Matthias Goerne, baryton ; Alexander Schmalcz, piano.
Voilà une très, très belle soirée dans la salle d‘opéra du Capitole, hélas soumise aux exigences sanitaires avec un tiers des spectateurs. C’est misère quand la qualité de la soirée aurait mérité salle pleine pour rendre hommage aux artistes. On ne présente plus Matthias Goerne célébrissime « liedersänger ». Ayant enregistré tant de disques acclamés. La voix est idéale de rondeur et de souplesse, le soin apporté au texte également. Matthias Goerne a tout absolument toutes les qualités requises et Schubert lui convient admirablement. Nous l’avions entendu dans cette même salle en 2019 déjà dans un récital tout Schubert. Frantz Schubert demande une sorte de simplicité et d’honnêteté qui sont l’apanage du chanteur allemand et de son pianiste. Le cycle de la « belle meunière » est parcouru par une poésie de la nature très évidente et une idéalisation de l’amour hyper romantique voire quasi symboliste. L’eau y est omniprésente et c’est son mouvement qui dirige le cycle. Nos deux artistes ce soir sont dans une fusion organique qui n’est que souplesse, liquidité et beauté. Le piano d’Alexander Schmalcz est si beau, si simplement liquide qu’il suit et suscite toute la richesse de l’interprétation de Matthias Goerne. Les nuances, les couleurs se répondent et se fondent. Matthias Goerne chante avec tout son corps, il danse quasiment, évoquant la souplesse des mouvements du ruisseau.
Quel legato de rêve, quels phrasés souples et élégants ! Son meunier prend vie sous nos yeux et la nature envahie la salle à l’italienne du Capitole comme par magie. Ce rapport si romantique à la nature est ce soir magnifié par deux artistes capables de rendre évidents la poésie de Muller si fidèlement mise en musique par Schubert. La voix est belle et le piano ne lui cède en rien. Nous avons deux artistes, frères siamois, qui sont de merveilleux musiciens poètes. L’amour de la femme rêvée, la mort symboliquement appelée, évoquent l’attrait du meunier pour l’eau, par le ruisseau personnifié et la fascination pour la couleur verte du monde végétal, dans lesquels il semble vouloir se fondre. Toute la beauté de ce cycle majeur de Schubert a été magnifié par des interprètes touchant la perfection. La beauté de la musique embrasse la pureté de la diction. Un Très grand moment musical de pure poésie nous a été offert ce soir. Le public a fait un triomphe aux artistes émus par cette reconnaissance. Et Matthias Goerne après un Amfortas mémorable l’an dernier va être l’Oreste de Strauss dans l’Elektra que le Capitole prépare pour la fin du mois. Cette prise de rôle sera majeure pour l’artiste et nous en rendrons compte.