Le Castel d’Alti est une maison de maître luchonnaise (à l’origine appelée Casal), mitoyenne de la Mairie, sur les fameuses allées d’Etigny (1), la promenade favorite des natifs de Bagnères de Luchon et des curistes comme des touristes. Riche d’une histoire commencée au XVIIIème siècle, avec en particulier le passage en ses murs de la danseuse demi-mondaine Clotilde Malfleuret, égérie de la « Révolution en jupons », ayant défrayé la chronique érotico-politique avant de faire envoyer à la guillotine un amant indélicat et de « faire don de son corps à la science » ; ce qui ne manque pas de piquant si l’on sait qu’elle était venue à Bagnères de Luchon pour « soigner une « maladie de peau » dont elle était fort incommodée et ne parvenait pas à se débarasser ».
Aujourd’hui totalement rénovée, cette magnifique demeure est devenue un hôtel de grande classe de 48 chambres avec une accréditation géothermique « green » (c’est à dire sans énergie fossile). Elle abrite une brasserie-bar-restaurant où la musique vivante sera présente en permanence : un piano à queue est installé à demeure sur une petite scène. Très lumineux, avec des carreaux blancs au sol et des murs ocres aux tons chauds, donnant sur le jardin et la piscine couverte, espace de balnéothérapie, le lieu peut accueillir jusqu’à 100 personnes dans une atmosphère chaleureuse.
Cette dimension correspond à l’esprit des Frères Lazaro, promoteurs de cette renaissance du lieu, qui partagent la passion de la musique en général, jazz en particulier, dont ils sont des amateurs éclairés, avec le sens de la convivialité.
Ils ont choisi pour faire vibrer le public le pianiste Philippe Léogé dont je vous ai déjà vanté sur ce blog, entre autres, le savoureux My french standards songbook.
Il a déjà animé les folles soirées de Luchon (à la Salle Henri Pac ou au Galeries Gourmandes, les GaGo comme l’on dit ici), et d’ailleurs, avec le Big Band Garonne, joué, en solo ou en groupe, partout dans le monde du Japon aux USA, sans oublier l’Hôpital des Enfants de Toulouse du temps bien révolu de la Culture à l’Hôpital, Salle Philippe Noiret où il s’est produit, comme nombre de musiciens, clowns, marionnettistes… (salle aujourd’hui démantelée et remplacée par des bureaux. Sans commentaire !).
Le «Pinktown Quintet», avec qui il se produira ici tous les soirs de cet été jusqu’au 1er septembre, est composé, outre le maestro, de ses fils Denis Léogé à la basse et Jordi Léogé à la batterie (comme pour Vicente Pradal, je me demande s’il y a une hérédité artistique ; en tout cas, ils ont baignés dans la musique dès l’enfance et décidé d’en faire leur vie…), d’Adrien Dumont à la trompette et Alesandro Torsiello au saxophone ténor.
Ils rendent hommage aux compositions des pianistes Horace Silver mais aussi de Sydnet Bechet, Duke Ellington, Wayne Shorter ou Herbie Hancock, ces « classiques » qu’on se prend à fredonner sans savoir les nommer, avec des arrangements parfois latins ou sud-américains, allant même jusqu’à des clins d’œil au tango ou à la mazurka. J’ai une tendresse particulière pour les Feuilles mortes ou Autumn leaves, une musique de Joseph Kosma sur le poème de Jacques Prêvert, (reprise par plus de 600 musiciens dont de nombreux jazzmen !).
Oh, je voudrais tant que tu te souviennes,
Des jours heureux quand nous étions amis,
Dans ce temps là, la vie était plus belle,
Et le soleil plus brûlant qu’aujourd’hui.
Tu vois, je n’ai pas oublié,
La chanson que tu me chantais.
C’est une chanson, qui nous ressemble,
Toi qui m’aimais, moi qui t’aimais…
Et ils glissent dans leur répertoire quelques compositions personnelles dans l’esprit de la grande période Blue Note des années 1960.
La complicité entre les musiciens fait plaisir à voir, leurs regards complices et leurs échanges de chorus sont réjouissants, toujours sur le fil du swing. Et l’on se croirait dans un des meilleurs clubs de Jazz de Paris, Londres ou de New York.
Ce quintet, qui entretient avec bonheur la flamme de la formule classique du Jazz à laquelle les Jazz Messengers ont donné ses lettres de noblesse, se produira à Marciac Bis les 11 et 12 août ; mais aussi au Taquin à Toulouse le 19 septembre et au Studio de l’Ermitage à Paris le 10 octobre, pour la sortie de leur premier disque.
D’ici là, si vous passez par Luchon et si vous aimez la musique qui réchauffe le corps et le cœur, n’hésitez pas à aller les écouter en fin d’après-midi, à l’heure de l’apéritif, ou après diner, pour boire un cocktail : nul doute que cet été les nuits seront chaudes comme le Jazz à Bagnères-de-Luchon, au
Le Castel d’Alti 21 allées d’Etigny 31110 Bagnères de Luchon 05.61.94.41.58
Pour en savoir plus :
1) Les allées d’Etigny sont ouvertes à travers champs en 1762 par le baron du même nom, pour relier le village aux « Baigneries » où un service médical est organisé… Ces nouvelles allées de 30 mètres de large sur près de 600 mètres de long permettent le développement urbain et dès le 18ème siècle s’y installent de vastes demeures. Les allées d’Etigny forment un ensemble assez homogène composé d’architectures de styles très divers.
… Sur ces allées ont aussi été construits de nombreux immeubles de villégiature, et de grands hôtels pour répondre à une clientèle exigeante. On reconnait ceux-ci à la dimension de leurs façades, ainsi qu’au grand nombre d’ouvertures et à l’ampleur des balcons. Nombre d’entre eux ont fait la vie touristique et mondaine de Luchon.
2) https://www.philippe-leoge.com/bio.htm
3) https://fr-fr.facebook.com/Pinktown5tet/