VERTICAL
Guillaume Sire
S’élevant des premières coursives jusqu’aux niveaux supérieurs, dans sa quête de lumière, une incroyable glycine irrigue de ses multiples ramifications la cour intérieure de ce petit immeuble. Suivant le chemin tracé par le végétal, les racines toulousaines de Guillaume Sire le poussent jusqu’au au dernier étage, pour s’y installer, voilà un peu plus de quatre ans.
Encore visibles, les vestiges d’un entrepôt à grains nous rappellent la proximité de la halle du même nom. Au cœur de son appartement, l’espace de travail est réduit au minimum et se partage entre une pièce équipée d’un bureau et un coin du salon où trône un meuble atypique : une écritoire. Celle-ci est particulière et ressemble à un secrétaire qui aurait été revisité par César : compressé sur les côtés et étiré en longueur, le support et la hauteur idéale pour écrire … debout, à l’image d’un Philip Roth ou d’un Jacques Brel, autres adeptes de la position verticale. L’auteur des confessions d’un funambule l’a dessinée lui-même avant de la faire réaliser par un artisan ébéniste du quartier Saint-Michel. Il y passe toutes ses matinées de travail. Fait de bois d’acajou, son plateau est recouvert d’un rectangle de cuir où vient se placer l’ordinateur portable, adhérant ainsi au pupitre aérien.
Si l’exercice d’écriture doit se prolonger, la stratégie de repli consiste en un confortable fauteuil dans le bureau mitoyen, élimé à souhait, à croire qu’un chat s’y est régalé de ses griffes. Le poste de travail est surmonté d’une œuvre de jeunesse quasi Dadaïste, révélant un passé et une velléité de graffeur contrariée, et jouxte une petite bibliothèque où figurent les propres ouvrages de l’écrivain, les dissimulant en toute modestie aux regards des visiteurs se tenant dans le salon.
Si ses divers ouvrages ont été publiés par plusieurs maisons d’édition (1), c’est une fidélité réciproque qui le lie à Lisa Liautaud, son éditrice, et qui devrait se vérifier à nouveau pour un prochain roman situé au Cambodge ; pays qu’il a visité il y a un an en prévision du récit à venir, et dont les livres s’y rapportant tiennent une bonne place dans sa bibliothèque.
Sa dernière publication en date (2), sortie récemment, est un essai de philosophie morale rédigé à l’encontre des moralisateurs, qui tend à démontrer que nous sommes entrés dans une époque qui a érigé les règles en dogmes en oubliant les principes qui ont dictés lesdites règles. Entreprise ambitieuse qui pourrait résonner de manière tout à fait actuelle, si l’on se réfère aux polémiques autour du spectacle Kanata de Robert Lepage l’an dernier, des plaintes à l’encontre de blackface ou plus récemment la pétition engagée contre la fresque du peintre Hervé Di Rosa accrochée à l’assemblée nationale ; un artiste qui n’a eu de cesse de défendre des valeurs et qui est attaqué au nom de ces mêmes valeurs, paradoxe dont Guillaume Sire identifie les sources dans son petit traité d’éthique.
(1)- Les confessions d’un funambule, 2007 Table Ronde ; Prépa HEC, 2011 Kirographaires ; Où la lumière s’effondre, 2016 Plon ; Les moteurs de recherche, 2016 La Découverte ; Réelle, 2018 L’Observatoire
(2)- Le diable est une méthode, 2019 éditions Ovadia
Site Internet de Guillaume Sire : https://guillaumesire.com
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