Marie Gauthier signe un premier roman, Court Vêtue, publié aux Editions Gallimard. Sur fond d’été et d’émois de la jeunesse, les deux personnages principaux nous entraînent dans leur quotidien.
L’entrée en matière est claire. Un jeune garçon Félix, 14 ans, commence un stage chez un cantonnier. La fille de ce dernier, Gil, à peine plus âgée que lui, provoque d’emblée la curiosité de l’adolescent. Car Gil n’est pas comme toutes les jeunes filles. Déscolarisée, elle aide son père qui vit seul, elle s’occupe de la maison. Mais Gil travaille aussi dans une supérette. Elle vaque d’un univers à un autre, sans se plaindre, en faisant ses corvées, sérieusement et sereinement. Puis, il y a Gil, la nymphe qui attire le regard des hommes. Plus âgés qu’elle, ces hommes l’entraînent, la dévêtent et l’abandonnent. Elle ne dit jamais rien, des scènes qui se répètent sans violence, sans émotion. Gil ne semble ni triste, ni heureuse. La monotonie de sa vie dans ce bourg quelque peu perdu semble lui convenir.
Une éducation sentimentale
Face à la sensuelle Gil, on retrouve Félix qui ne sait pas comment l’aborder, comment l’approcher. Car Gil, elle lui plait. Et même beaucoup. Il découvre auprès d’elle des sentiments inconnus. Des émotions qui le perturbent et qu’il a envie d’explorer. Alors il fait tout pour attirer l’attention de son hôte. Mais il n’est jamais intrusif ou lourd. Il attend, il espère. Timide, il avance précautionneusement dans l’univers de celle qu’il trouve si mystérieuse. Il aimerait savoir ce que fait Gil lorsqu’elle quitte la maison, préparée, maquillée et chaussée de hauts talons.
Marie Gauthier décrit très bien ce bouleversement total qu’est la découverte de l’amour. Elle donne vie à ses personnages en s’intéressant à la dimension charnelle et sensuelle qui annonce les prémisses du désir. Court Vêtue est un texte qui se lit d’une seule traite, porté par une candeur naturelle, un mystère sensuel. On ne lâche pas le récit de cet été qui est sur le point de basculer.
Marie Gauthier, Court vêtue, Gallimard, 112 p.
Photo : Gauthier Marie © F. Mantovani