La peinture répétitive affronte le silence intérieur,
pour cette raison elle ignore le renouvellement,
elle est scellée au silence comme au mystère de la vie et de la mort
qui sourd infiniment à la manière d’une source.
Infiniment elle recommence.
Ses traits à l’encre ne représentent pas le temps : ils sont le temps. La Galerie Jean-Paul Barrès expose Marine Bourgeois.
Ce peintre de l’étrange vit et travaille maintenant à Toulouse. Voilà bientôt vingt ans que Marine Bourgeois trace sur toile tendue sur châssis, des lignes horizontales de petits traits verticaux, à l’encre de Chine. Étrange, n’est-ce pas ? Ce mode de travail, elle l’explique en vous disant que, son propos est de s’en tenir à l’essentiel, soit, l’expérience de l’instant présent. Une façon de lutter contre l’asphyxie que représentent ces moyens multiples de nous abreuver d’images, de nous saouler d’informations, de nous massacrer la pensée de vidéos, en un mot de satisfaire notre avidité de consommateur et d’anéantir le penseur.
Marine Bourgeois n’apprécie pas particulièrement tout ce qui est hyper. Et pour lutter contre ce qui, de façon irrépressible, nous attire au fond de ce gouffre empli au bilan de néant, l’artiste a forgé sa vigilance par le tracé sans fin de ces petits traits. Chacun est bien un instant présent. Or, celui-ci, pour le peintre, est une source de fraîcheur et de liberté.
Tout comme le dit Pierrette Bloch, l’une des grandes figures actuelles de la peinture en France, qui a su imposer ce type de travail : « Ce n’est plus une surface, mais une aventure dans le temps. Le format n’existe plus. Il ne réapparaîtra qu’une fois le dessin terminé, le lendemain quand je le revois. » Dans le cas de notre artiste, cela peut être au bout de plusieurs mois.
Par ce côté répétitif, point de souci que pourrait déterminer un besoin de renouvellement. Comme si chaque trait était à la fois, le début, le déroulé et la fin de l’histoire d’un morceau du temps écoulé. Il est, ou il semble être comme le précédent, et c’est pourtant un nouvel univers.
Marine Bourgeois vous dirait encore : « Traçant sans fin des petits traits à l’encre,
Il ne s’agit pas de compter le temps à la manière des barres du prisonnier
mais au contraire de le savourer,
de le retenir peut-être dans la conscience de l’instant présent
l’espace et la lumière qui m’entourent »
« Chaque trait : une chance de se (re)poser dans l’instant, l’espace, la lumière, le corps. », de même que l’artiste ne souhaite pas faire des tableaux mais revenir toujours au même qui contient l’infinité. « Œuvrant dans tout le sens ma pratique n’est que silence. » Et, il est bien vrai de remarquer qu’une telle exposition n’incite qu’au silence, ou plutôt à des silences, dans un espace débarrassé de toutes pollutions visuelles ou sonores.
Galerie Jean-Paul Barrès
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1 place Saintes Scarbes • Toulouse
Marine Bourgeois
Exposition du 17 janvier au 16 février 2019