Ce documentaire présenté au festival de Cannes emporte tout le monde dans le tourbillon du Grand Bal de l’Europe où plus de 2000 amateurs de danses traditionnelles se rassemblent chaque année. A voir en ce moment au cinéma.
Tous les étés à Gennetines dans l’Allier, on danse jusqu’à l’épuisement. Pendant sept jours et huit nuits, plus de 2000 participants se retrouvent au milieu de la nature et s’abandonnent aux rythmes des valses, polkas, bourrées et autres mazurkas. Un monde à part où le temps semble suspendu. Pendant la journée on profite des ateliers, avant de participer, le soir venu, aux bals tant attendus sous les grands chapiteaux blancs. Et quand les parquets ferment et que la fête semble terminée, elle continue encore autour des bœufs qui résonnent jusqu’au petit matin. Rebelote le lendemain.
Comment rester éveillé et danser si longtemps ? « Il s’y passe quelque chose sans commune mesure », répond la réalisatrice en voix off. Ici, la danse unit les danseurs de toutes les générations, quels que soient leur langue ou leur milieu. On se touche même si on ne se connaît pas. Au milieu de ses corps qui tournoient, la caméra s’attarde sur les émotions, les regards, les échanges et la façon dont chacun lâche prise jusqu’à atteindre l’osmose. Un moment précieux où l’amour des autres est nécessaire pour « écouter ce qu’on nous chuchote, écouter l’autre, sentir qu’on est dans la vie », souffle Laetitia Carton qui a elle même participé au Grand Bal de l’Europe avant de décider d’en faire un film.
Les sons qui résonnent sont ceux du temps passé, du temps de sa grand-mère quand elle dansait aux fêtes de villages : « […] la danse la transportait. Son visage s’illuminait quand elle me racontait ces nuits dans l’ivresse du mouvement, de la musique. Je pense que même sans l’avoir vue danser, elle m’a transmis son amour des bals ». La maraîchine originaire du marais vendéen, le branle de Noirmoutier …. Le « bal trad » trace un lien avec les cultures et le passé en gardant en vie les danses des anciens.
Il est extraordinaire de voir tous ces sourires accrochés aux lèvres des participants. Même si le bal apporte parfois son lot de tristesse et de frustration, parce qu’un danseur atteint ses limites physiques, parce qu’il est débutant et que personne ne l’invite ou parce qu’un partenaire se montre un peu trop tactile. Mais au final, la joie reste reine en ces lieux et chacun semble venir chercher au Grand Bal ce qu’il ne trouve pas dans la société : un environnement chaleureux, une connexion, quelque chose qui donne la sensation d’être vivant conclut Laetitia Carton qui donne à voir avec ce documentaire « comme c’est différent, quand on ose enfin se toucher, quand on se regarde, quand on vit ensemble et que la vie pulse ».
Le Grand Bal, un film de Laetitia Carton. Sortie le 31 octobre 2018.
Festival de Cannes 2018, Sélection officielle – Cinéma de la Plage.
France, documentaire, 89 min.