Compte-rendu, concert. TOULOUSE, le 27 oct 2018.

Le Toulouse Wind Orchestra est un orchestre d’harmonie qui en trois années a su avec un brio étonnant, gagner un public nombreux et enthousiaste. Les deux concerts de cette année ont fait salle comble. Les trois enregistrements qui correspondent aux trois séries de concerts des années précédentes rendent comptent de l’excellence de cet orchestre. Originalité des programmes et exemplarité des choix interprétatifs sont deux des principales qualités du collectif. Composé de jeunes professionnels tous bénévoles, il atteint un niveau de perfection technique incroyable. Mais c’est surtout au concert que tout prend une direction extraordinaire. J’étais sous le charme de leurs deux premiers enregistrements mais j’ai été subjugué par ce concert.

Aussi forts que délicats…
Toulouse Wind Orchestra : des musiciens d’exception

Toulouse Wind Orchestra

L’auditorium Saint-Pierre des Cuisines est un écrin idéal. Bien installé, tout l’orchestre, qui varie son effectif pour chaque œuvre, peut déployer un bouquet de sonorités prodigieux. Que ce soit les pupitres de clarinettes soyeux, les hautbois frais, les flûtes subtiles et les bassons profonds, l’écoute entre les instrumentistes est un régal pour l’œil comme pour l’oreille. Mais c’est surtout la splendeur et la délicatesse des nuances des gros cuivres qui fait merveille. Cette qualité de justesse et de nuances n’est pas l’apanage de tous les orchestres symphoniques. Les cors admirables de présence, les tubas prodigieux de nuances, et les Euphoniums aux timbres si beaux et la virtuosité sidérante, sont de la partie. Mais comment ne pas dire le plaisir à entendre de si beaux saxophones et les tubas puissants sachant être si délicats ! Chaque moment soliste sera un festival de beautés en terme de couleurs, nuances et phrasés. L’association des contrebasses et des violoncelles ajoute une solidité et une chaleur précieuses. La précision des percussion est sensationnelle. Et le piano, le célesta et les harpes ajoutent une belle présence  toute de poésie.

Dionysiaques de Florent Schmitt est une pièce écrite pour un orchestre d’harmonie. Elle sonne majestueuse et sensationnelle, révélant toutes les splendeurs d’un orchestre d’harmonie avec des nuances et des couleurs spectaculaires. La direction de Mathieu Romano est d’une clarté parfaite. Ses beaux gestes portent les instrumentistes à se dépasser.

Puis la création d’une œuvre à la demande de l’orchestre serait déjà un événement mais que ce soit un Concerto pour hautbois et orchestre d’harmonie, élargi aux violoncelles et contrebasses, fait sensation Car cet instrument si délicat mérite bien le soin amoureux que le compositeur a pris pour lui. Gabriel Philippot a su écrire très rapidement une très belle œuvre qui va certainement avoir la diffusion qu’elle mérite. Cela sonne très français à la manière d’un classique ou d’un Poulenc : tout est élégance et charme, avec des pointes de lyrisme plus extraverties. Le premier mouvement varie les styles, passant par une partie centrale plus lyrique. Le début est plein de charme et offre des phrases pleines d‘esprit au soliste. Le dialogue avec l’orchestre est savoureux. Les traits et la grande cadence mettent en valeur le jeu très virtuose du soliste Alexandre Gattet. La vivacité qui termine ce premier mouvement et le chic de l’interprétation enflamment le public dont une grande partie applaudit. Le deuxième mouvement est plein de profondeur et demande au soliste de phraser comme un Dieu. Alexandre Gattet avec une admirable technique de souffle ne semble pas respirer et peut ainsi filer le son à l’infini. L’effet est musicalement très émouvant. Le final vif argent termine cette très belle oeuvre dans une véritable apothéose. L’alchimie entre le solistes et ses amis de l’orchestre est parfaite. La direction attentive et souple de Mathieu Romano est de toute beauté.

En bis Alexandre Gattet offre une adaptation virtuose de la chanson phare de Nougaro « O Toulouse » Un véritable régal qui enchante et séduit évidemment le public.

Toulouse Wind Ochestra

Pins de Rome d’Ottorino Respighi adaptés pour l’orchestre de ce soir en permet une interprétation de première grandeur. La richesse des sonorités, l’ampleur des nuances passent du soleil éclatant à la nuit mystérieuse avec la plus plus grande aisance. Les Pins des catacombes est peut être la réussite la plus spectaculaire. Quand au final la manière dont Mathieu Romano en construit la progression est tout à fait géniale, débouchant sur un final éblouissant.

Et que dire de la passion que diffuse l’implication totale de chaque instrumentiste ?  Bien sûr les solistes irradient de leur lumière mais par exemple la qualité du pupitre des clarinettes, leur homogénéité n’ont rien à envier aux meilleurs violonistes. La trompette lointaine de Hugo Blacher marquera les esprits comme un moment de pure magie. Vraiment il faudrait citer chaque musicien tant le jeu collectif est admirable et la joie de faire de la musique ensemble, irradie.

La jeunesse, le travail, le don de soi : un tel programme atteint à la plénitude du bonheur musical partagé avec le public.

L’enthousiasme déclenché fait exulter tout l’auditorium qui obtient un magnifique bis … lequel met en valeur les merveilleux solistes dans une tenue rythmique parfaite. Et beaucoup d’humour avec en particulier l’inénarrable Olivier Castellat à la guitare électrique. Le Wind Toulouse Orchestra ne se réunit que trop rarement mais à chaque fois monte au ciel. L’enregistrement du concert qui sortira l’an prochain confortera la splendeur des talents de tous ces grands musiciens.

Hubert Stoecklin


Compte rendu concert. Toulouse. Auditorium Saint Pierre des Cuisines,le 27 oct 2018.  Florent Schmitt (1870-1958) : Dyonisiaques Op. 62 ; Gabriel Philippot  : Concerto pour hautbois ; Ottorino Respighi (1879-1936) : Pins de Rome. Alexandre Gattet, hautbois ; Toulouse Wind Orchestra ; Mathieu Romano, direction.

Illustrations :
La formation et A. Gattet pour la création du concerto de Philippot
La formation orchestrale pour les Pins de Rome de Respighi