Compte rendu concert. Toulouse. Halle-aux-grains, le 8 juin 2018. Verdi. Requiem. Orfeon Donostaria. Orch Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev, direction.
Ce concert a été doublé. Nous avons assisté au premier concert, salle comble. L’entrée du chœur si connu et aimé des toulousains a comme galvanisé l’ambiance. C’est l’entrée de Tugan Sokhiev affable mais très concentré qui a donné le ton de la soirée. Loin de l’hystérie que certains aiment à voir dans ce qu’ils considèrent comme un opéra déguisé, Tugan Sokhiev de sa présence bienveillante et de son attention à chacun, a marqué ce Requiem d’une émotion particulière.
Le Requiem de Verdi en toute splendeur
La beauté de la partition, ses richesse ses hommages aux anciens et ses audaces ont été abordées avec pondération dosant entre l’infinitésimal piano et le fortissimo à faire trembler les murs. Tout ce que contient la partition de beauté a pu s’exprimer par les mains nues du chef obtenant de chacun le meilleur de lui-même. Chœur ductile, comme sculpté, orchestre concentré et merveilleux de sonorités riches et de tension, toute qualités mises au service de la partition. Car ce Requiem auquel Verdi tenait tant, fait une synthèse remarquable entre les qualités théâtrales et spirituelles du Verdi de la maturité. Le chœur basque, Orfeo Donostaria, est un partenaire régulier de l’Orchestre pour la plus grande joie du public. Il a eu un succès retentissant tant il a été magnifique. Les solistes ont tous été très engagés, fins musiciens et grandes voix sachant dans leurs ensembles galvaniser leur puissance expressive. L’émotion de l’Ingemisco du ténor Saimir Pirgu a été admirablement équilibrée entre l’extériorisation due à la tessiture et l’émotion du texte. La mezzo soprano Anna Kiknadze a la voix large qui convient et a su nuancer avec subtilité le si délicat duo de l’Agnus Dei avec la soprano, comme une suspension de beauté et de pureté après le Dies Irae terrible dans sa spatialisation et ses répétitions, et le Rex Tremendae à faire trembler les morts comme les vivants. La basse Vitalij Kowaljow a l’autorité et le timbre adéquats et a rempli sa partie avec le poids attendu. La plus admirable est la soprano Joyce El-Khoury à la voix chaude et nuancée. Elle a su éviter de poitriner outrageusement pour se faire entendre pouvant compter sur la vigilance de Tugan Sokhiev. Le Libera me final reste un grand moment de chant verdien d’extase et de prière angélique. Le chant pianissimo assumé et musicalement superbement phrasé donne beaucoup de force expressive à ces pages si difficiles. Le murmure final avec le chœur a été un moment de pure grâce. La direction de Tugan Sokhiev est un modèle d’équilibre et d’attention aux nuances afin de ménager de très beaux effets. La parfaite tenue rythmique, l’absence de sentimentalisme a garanti la pureté de l’émotion, évitant pathos ou rubato excessif. Le parti pris musical de respect et de tenue a porté ses fruits car c’est la plus belle version obtenue par ce chef. Même à Orange en 2016 avec une soprano calamiteuse, mais un ténor de grâce, les conditions particulières du Théâtre Antique et la projection d’images inappropriées n’avaient pas amené cet équilibre admirable entre fine musicalité et puissance expressive. La Halle–aux-Grains a été ce soir l’écrin idéal qui a rendu justice à la beauté toujours renouvelée de cette magnifique version du Requiem de Verdi. Le lendemain le concert a remporté le même succès et semble- t il encore gagné en émotion.
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Compte-rendu, concert. Toulouse. Halle-aux-Grains, le 8 juin 2018. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Messa da Requiem. Joyce El-Khoury, soprano ; Anna Kiknadze, mezzo-soprano ; Saimir Pirgu, ténor ; Vitalij Kowaljow, basse. Orfeon Donostaria, chef de chœur : José Antonio Sainz Alfaro ; Orchestre national du Capitole de Toulouse ; Tugan Sokhiev, direction musicale.
Publié sur Classiquenews.com
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