Le 2 juin, Tugan Sokhiev, à la tête de l’Orchestre national du Capitole, investit un double programme franco-russe dans lequel la création d’hier rejoint celle d’aujourd’hui. Claude Debussy, Maurice Ravel et Sergueï Prokofiev sont en bonne compagnie avec Bruno Mantovani dont on célèbrera la création d’une œuvre symphonique, objet d’une double commande de la Philharmonie de Paris et de l’ONCT. Le grand pianiste Nicholas Angelich sera le soliste de ce concert très attendu.
Présent récemment à la Halle aux Grains pour diriger un somptueux programme de musiques d’avant-garde du passé récent, Bruno Mantovani revient à Toulouse en tant que compositeur. Sa dernière pièce symphonique, intitulée Quasi lento, sera jouée en création mondiale ce 2 juin. Elle sera reprise, sous la baguette de Tugan Sokhiev, le 5 juin lors d’un concert à la Philharmonie de Paris.
Dédiée à David Minetti, clarinettiste solo de l’Orchestre du Capitole, Quasi lento est définie de la manière suivante par Bruno Mantovani lui-même : « Le concerto a toujours été le genre où je me suis senti le plus à l’aise. (…) Dans cette nouvelle œuvre, la clarinette, mon instrument fétiche, occupe une place ambiguë. En effet, elle est à la fois membre de l’orchestre et soliste récurrent. Le modèle est ici clairement avoué : il s’agit du Prélude à l’après-midi d’un faune de Claude Debussy. Comme dans cette pièce de référence, l’instrument principal guide le discours et contamine la texture générale d’un orchestre de vastes dimensions, oscillant sans cesse entre la musique de chambre et le gigantisme sonore.
La pièce n’aurait jamais vu le jour sans la sonorité inspiratrice de David Minetti avec lequel j’éprouve un plaisir permanent à travailler depuis quelques années. »
La confrontation avec deux autres grandes œuvres musicales françaises du XXème siècle sera donc, à cet égard, particulièrement instructive. Tugan Sokhiev dirigera en effet La Mer, partition emblématique de Claude Debussy, et la Suite n° 2 de Daphnis et Chloé, de Maurice Ravel. Caractérisée comme « trois esquisses symphoniques pour orchestre », La Mer évoque une symphonie qui ne dit pas son nom. Créée en 1905 sans grand succès, cette œuvre est devenue au fil du temps l’une des compositions orchestrales de Debussy les plus jouées. Daphnis et Chloé, symphonie chorégraphique pour orchestre et chœur sans parole, écrite par Maurice Ravel entre 1909 et 1912, est le résultat d’une commande de l’impresario russe Serge de Diaghilev. Deux suites d’orchestre ont été tirées du ballet complet. La Suite n° 2, qui conclura ce concert, coïncide avec la fin de l’œuvre, à partir de ce sublime « lever du jour », jusqu’à l’irrésistible bacchanale finale.
En outre, le plus populaire des concertos de Sergueï Prokofiev, le bouillonnant 3ème, sera joué en soliste par le plus français des pianistes américains, Nicholas Angelich. Grand interprète du répertoire classique et romantique, Nicholas Angelich s’intéresse également à la musique du XXème siècle : Olivier Messiaen, Karlheinz Stockhausen, Pierre Boulez, Éric Tanguy et… Bruno Mantovani dont il a créé Suonare. Il se produit aussi bien en récital qu’avec les orchestres symphoniques majeurs du moment. Il est souvent présent à Toulouse, soit en concert avec l’Orchestre national du Capitole, soit en récital, en particulier dans le cadre du Festival International Piano aux Jacobins.
Créé à Chicago le 16 décembre 1921 avec le compositeur au piano, le 3ème concerto de Prokofiev est devenu célèbre à la suite de son exécution parisienne en 1922 sous la direction de Serge Koussevitzky. Lyrisme et effervescence rythmique composent une œuvre au pouvoir hypnotique hors du commun.
Serge Chauzy
une chronique de ClassicToulouse
Orchestre National du Capitole
Tugan Sokhiev (direction) – Nicholas Angelich (piano)
samedi 2 juin 2018 (20h00) – Halle aux Grains