L’Espace Écureuil expose jusqu’au 24 février, une série d’œuvres contemporaines. Une expérience intellectuelle et sensible des formes d’art les plus subtiles.
«J’estime que l’œuvre d’art accomplie sera celle qui passera d’abord inaperçue, qu’on ne remarquera même pas » c’est d’après ces mots d’André Gide que se déploie l’art de la discrétion. Un contre-pied revendiqué aux couleurs voyantes et aux surexpositions indécentes des œuvres d’Andy Warhol. L’art de la discrétion c’est au contraire l’élément subtil, l’instant a priori sans importance où se révèle l’expression artistique. L’ombre d’une pomme tout juste esquissée au coin d’un tableau, la nuance d’une couleur, le temps qui passe et efface les traits d’une sculpture, un portrait à l’eau qui s’évapore au soleil et rend l’acte de création d’autant plus beau qu’il est éphémère et insaisissable.
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En déambulant dans dix salles, chacune intitulée suivant le thème abordé, le visiteur est amené à vivre une expérience à la fois intellectuelle et sensible pour tenter de saisir cet « inframince », concept inventé par l’artiste Marcel Duchamp pour définir la quête artistique des formes les plus ténues, dissimulées dans chaque objet et action de la vie. Les œuvres, issues de différents artistes, ne sont pas indépendantes les unes des autres mais au contraire «tissent entre elles des liens ». Elles s’adressent aux ressentis du spectateur. Peut-on considérer un monochrome, ou un faible trait de crayon comme de l’art ? Pour Quentin Jouret, commissaire de l’exposition, «les choses apparaissent dans des émanations tellement fines voire imperceptibles qu’elles demandent un effort mental pour être appréhendées. »
L’œuvre y perd parfois sa dimension physique d’objet pour ne laisser percevoir qu’une idée, un concept abstrait. Le visiteur est voué à sa propre interprétation.
Une ambiance cabinet de curiosités
Vieux tapis, chaises et fauteuils usés donnent l’impression de pénétrer dans un appartement démodé. Une mise en scène reliant les œuvres en un tout cohérent. Ainsi l’exposition devient un art de la discrétion à elle seule en évoquant l’absence supposée d’un propriétaire. Des sculptures, des tableaux, des projections filmiques côtoient des installations et une bibliothèque en désordre. Tout devient prétexte à expérience parce qu’ici les oeuvres se découvrent autrement, que le visiteur est acteur et interprète, et que le lieu met l’objet en valeur, l’art est alors révélé.
Claire Eckersley
Exposition L’art de la discrétion
Espace Ecureuil
Jusqu’au 24 février 2018