Quand l’illustre Charles Perrault voit l’un de ses contes pour enfants remis au goût du jour par la non moins célèbre Amélie Nothomb, cela donne Riquet à la houppe, un roman aussi drôle que fantaisiste.
Il était une fois Déodat, fils d’Enide et d’Honorat, et son antithèse, la jeune Trémière, fille de Rose et de Lierre… Alors que le premier se distingue dès l’enfance par sa profonde laideur et son esprit des plus brillants, la seconde ne fera, par son incroyable beauté et sa grande bêtise, qu’alimenter haine et moqueries sitôt sa première immersion dans le monde. Tout semble ainsi les opposer, si ce n’est le subtil mélange d’attraction et d’aversion qu’ils suscitent chez tout un chacun. Mais c’est surtout une intangible soif de contemplation qui les liera au-delà de leurs dissemblances. Par ce court roman, l’auteure nous invite à suivre les parcours de ces deux « monstres humains » jusqu’à l’inéluctable rencontre amoureuse.
« L’art a une tendance naturelle à privilégier l’extraordinaire.»
À travers cette transposition contemporaine du conte éponyme de Perrault, Amélie Nothomb passe au crible la nature humaine face à la force des apparences. Sur fond de fluidité érudite, cette histoire, qui n’est pas sans rappeler La belle et la bête, mène la vie dure à nombre de préjugés. Ses personnages, aussi caricaturaux qu’ils s’avéreront complémentaires, feront naître autant de clairvoyance dans l’idiotie qu’un irrésistible charme chez le plus hideux d’entre tous. À l’image du conte dont il est issu, Riquet à la houppe nous propose plusieurs degrés de lecture, du plus simple au plus profond. On ne pourra, en outre, qu’apprécier l’humour et la légèreté avec lesquels l’auteure belge nous parle d’Extraordinaire et de Rejet.
Les amateurs de contes prendront plaisir à retrouver le caractère intemporel des thèmes abordés et l’heureux dénouement de cette histoire d’amour hors norme. Les fervents lecteurs d’Amélie Nothomb, quant à eux, pourront cependant regretter que ce nouveau roman s’éloigne, une fois encore, des récits aux inspirations autobiographiques auxquels elle nous avait habitués et qui nous ont irrémédiablement accrochés à sa plume depuis ses débuts.
Aude Boisselet
Riquet à la houppe, 198 pages Albin Michel
Amelie Nothomb © Olivier Dion