Production du Théâtre du Capitole captée en 2012, « Rienzi » mis en scène par Jorge Lavelli est éditée en DVD, avec le ténor allemand Torsten Kerl dans le rôle-titre.
Couronnée la saison dernière meilleur spectacle lyrique en région, par le Syndicat de la critique, une production du Théâtre du Capitole est éditée en DVD. Il s’agit de la mise en scène du très rare « Rienzi » confiée en septembre 2012 à Jorge Lavelli. Lequel installe l’action du troisième opéra de Richard Wagner dans les bas-fonds industriels d’une Rome intemporelle. Signé par le compositeur, le livret de « Rienzi, le dernier des tribuns » s’intéresse au personnage historique de Cola di Rienzo, un plébéien et notaire du Pape qui instaure la République à Rome au milieu du XIVe siècle.
Le metteur en scène inscrit son travail dans la continuité de sa précédente production toulousaine, celle du « Simon Boccanegra » de Verdi créée à la Halle aux Grains à l’automne 2009 : «Le personnage historique de Rienzi est cité dans le premier acte de « Simon Boccanegra », personnage éponyme de l’œuvre trahi par ses proches, offrant à la population plus de liberté. Pour « Rienzi », j’ai sans aucun doute cherché un même dépouillement que dans mon « Simon Boccanegra », pour servir des fins tout à fait similaires. Rienzi est comme Simon Boccanegra un homme du peuple, plus rustre peut-être, qui s’impose (…)», prévient Jorge Lavelli. On retrouve dans cette production l’esthétique de la précédente : le rouge et le noir des costumes, les visages blafards, la lumière émergeant de l’obscurité, la verticalité des décors.
Dès l’ouverture, l’ampleur de la direction de Pinchas Steinberg à la tête de l’ Orchestre du Capitole est phénoménale. Le chef a amputé la partition de près de deux heures sans nuire à la cohérence de l’œuvre. Il la porte avec une incroyable énergie, soutenue par un orchestre exemplaire et captivant jusqu’à la dernière note. Omniprésente, la partie chorale est magistralement portée par le Chœur du Capitole renforcé par l’académie de la Scala de Milan. La distribution est tout aussi convaincante, dominée par Torsten Kerl dans le rôle-titre. Le ténor allemand livre une performance d’une grande intelligence, retenant sa voix dans les premiers actes pour mieux la déployer par la suite. On ne peut qu’être impressionné par les subtilités dramaturgiques de sa démarche et son indéniable capacité à incarner ce personnage aux multiples facettes.
Dans le rôle d’Irène, la soprano suédoise Marika Schönberg s’économise moins. Le rôle travesti d’Adriano est confié à la mezzo-soprano allemande Daniela Sindram dont l’assurance vocale fait ici sensation. Tous tirent parti de la précision sans faille d’une minutieuse direction d’acteurs. Dans sa mise en scène aussi audacieuse que réservée, Jorge Lavelli distille quelques moments d’une grande beauté formelle, comme la poignante prière de Rienzi ou le sensationnel embrasement final. Spectacle total, cette production événement fut alors acclamée avec faste par un public fort enthousiaste.
Jérôme Gac
« Rienzi », Théâtre du Capitole / Opus Arte (2013)
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« Rienzi » © Tommaso Le Pera
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