A moins que vous ne reveniez d’une immersion de 6 mois chez les papous de Nouvelle Guinée ou que vous ayez perdu récemment la vue et l’ouïe, vous avez forcément entendu parler de Gravity ; Gravity et son lot d’analyses d’experts du CNES épiloguant sur la véracité de ce qu’on voit à l’écran, ses commentaires de spécialistes qui en connaissent un rayon sur l’impact du rayonnement solaire en apesanteur. Mais comme Gravity reste avant tout du cinéma, je vais à mon tour vous faire part de mon avis sur la question.
Le docteur Ryan Stone (que ce patronyme ne vous induise pas en erreur, cette personne possède tous les attributs féminins) effectue sa première expédition à bord d’une navette spatiale. Elle n’a cependant pas été lâchée seule dans l’espace puisqu’elle est accompagnée d’un astronaute chevronné, Matt Kowalsky. Elle effectue des réparations, il surveille les opérations.
Cela pourrait presque s’apparenter à une promenade de santé si l’être humain n’était pas un dégueulasse de première. Au cours de l’histoire de la conquête spatiale, des débris en tous genres se sont amoncelés autour de l’orbite terrestre, rendant le travail des astronautes bien périlleux.
Cette accumulation de détritus, voyageant à grande vitesse, va mettre leur vie en danger : un amas vient percuter la navette et arrache le bras articulé où était arrimée le docteur Stone. Partant en vrille dans l’espace, le seul lien qui peut la maintenir en vie est cette voix dans son oreille …
A toi l’amateur de sensations fortes, toi qui t’es toujours pressenti comme le digne successeur de Neil Armstrong, toi qui recherche le réalisme, la perte de repères, l’espace infini et le froid glacial, Gravity est fait pour toi.
Alfonso Curaon (et son équipe, car pour pareille aventure il faut savoir s’entourer de gens inventifs et solides techniquement !!) livre un long – métrage qui révolutionne et repousse très loin les limites du cinéma connu et marquera sans contexte son époque. Je ne crois pas trop m’avancer en disant qu’on n’a rien vu d’aussi révolutionnaire depuis les premiers pas de Georges Lucas ou Ridley Scott (qui évoluaient toutefois dans des univers bien plus fictionnels).
Les images de la Terre et de l’espace sont magnifiques, les scènes d’action littéralement à couper le souffle. Cela n’a rien d’une métaphore, au cours de plusieurs d’entre elles je me suis retrouvée en apnée totale tant l’immersion (et le stress en résultant) était intense.
Au – delà des prouesses techniques (que je serais bien en peine de vous expliquer, mais on s’en fiche un peu, seul compte le rendu de l’apesanteur, fantastique !) et de l’apport de la 3D, la caméra de Cuaron se fait habile et imaginative pour nous balader dans de longs plans séquence passant d’un environnement extérieur (froid, désolé) à l’intérieur du casque de Sandra Bullock (où la panique palpable fait monter la température). Le plongeon est encore plus extrême quand la caméra devient subjective et qu’à travers les yeux de l’actrice on progresse à l’intérieur d’une station spatiale dévastée …
Un immense travail autour du son est aussi à signaler. On le sait bien, dans l’espace personne ne vous entendra crier, mais » un film totalement silencieux aurait perdu le spectateur » dixit le réalisateur. Ce sont donc les effets sonores (amplification, distorsion, assourdissement du son), les liaisons radio avec la NASA (et la voix d’Ed Harris, on saluera au passage le clin d’oeil à Apollo 13), les respirations haletantes et la musique hawaienne qu’écoute George Clooney qui comble le vide intersidéral.
Mais alors, tout est formidable dans Gravity ?? Ne soyons pas angélique, on peut toujours trouver des choses à redire. Comme par exemple le fait que l’héroïne (Sandra Bullock, très bien) reste une novice qui s’en sortirait beaucoup moins bien sans les conseils avisés d’un mentor (Georges Clooney, dont la coolitude inoxydable traverse aussi bien les décennies que l’espace).
On en prend son parti, le plus embêtant dans cette affaire se concentre surtout autour de l’histoire elle – même.
Si sur le plan de l’idée, de la réalisation et des effets spéciaux Alfonso Curaon ne craint personne, on regrettera par contre un déroulé bien convenu, faisant appel à des poncifs maintes fois vus : blessure secrète sur laquelle s’appuie le héros, don de sacrifice, jauge d’oxygène et réserve de carburant au plus bas, timing minuté à respecter, philosophie à deux francs six sous, fin quelque peu prévisible … Il est tout de même regrettable que film de divertissement rime si souvent avec manque d’imagination scénaristique (le précédent long – métrage du réalisateur, Les fils de l’homme, souffrait d’ailleurs des mêmes symptômes).
Si l’on résume, vous n’irez pas voir Gravity pour l’originalité de son intrigue mais plutôt pour l’expérience – claque – dans – la – gueule que vous procurera ce voyage stratosphérique totalement hallucinant.
En vous remerciant.