Avec le festival Les Bruissonnantes, le Théâtre Le Hangar, lieu toulousain discret mais vivant, affiche sa quête d’un théâtre qui repousse les limites du langage scénique.
Comédiens, metteurs en scène et co-directeurs de la compagnie Lohengrin, Laurence Rioux et Didier Roux ont ouvert leur théâtre, Le Hangar, en 2000. Ils savaient alors que la création, l’accueil de compagnies et la formation seraient trois axes intimement liés dans une réflexion globale du théâtre contemporain. Une scène qui déborde du champ théâtral en s’ouvrant à toutes formes de gestes artistiques que ce soit la danse, la musique, la conférence, la poésie. Avec sa subvention annuelle de la Ville qui s’élève à 32 000 €, Le Hangar rémunère tous les artistes programmés, accueille chaque année dix compagnies régionales en résidence, et dispense une formation professionnelle. La programmation procède de coups de cœur et de prises de risques réussies, comme ce fut le cas en février avec le poète sonore Charles Pennequin trop méconnu dans la sphère théâtrale. Ce sera encore le cas en fin de saison, avec le metteur en scène et pédagogue Bernard Guittet et sa très attendue conférence-performance d’après sa méthode «l’Improvisation libre» : « Pourquoi j’ai quitté le théâtre pour la scène ? ». D’ici là, les murs noirs du théâtre verront en avril la dernière création de Nathalie Nauzes – « Purgatory », un Nô irlandais de William Butler Yeats – et le tout prochain festival Les Bruissonnantes dont on attend la deuxième édition en mars.
Du grec «poiêsis», «poétique» signifie «fabriquer». Poètes de l’action, musiciens, performeurs, acteurs : les artiste invités des Bruissonnantes fabriquent leur propre langage. Pour ce panorama annuel des pratiques contemporaines du poétique, seront réunis des habitués du festival et des nouveaux venus. Trois jours de diversités de formes dont le dénominateur commun est la forte dimension scénique. Ainsi, la comédienne toulousaine Catherine Froment utilisera comme elle sait le faire, son corps comme moyen d’expression directe. Chanteuses et comédiennes de la compagnie Les z’OMNI, Hélène Laffont et Claire Hugot interprèteront des récitations enfantines de Georges Aperghis dans une forme musicale, y faisant percevoir les touchantes hésitations et les errances. Le fantasque, poète et professeur de lettres, Yves Le Pestipon donnera une conférence ludique sur la poésie sonore intitulée «La voix nue doit-elle se rhabiller?», sur le thème du Printemps des Poètes – «Les voix du poème» – dans lequel s’inscrit le festival. Christian Prigent, grand penseur de la poésie sonore, fera entendre ses textes rabelaisiens, carnavalesques et détournements de proverbes. Quant au poète pneumatique et écrivain Sébastien Lespinasse, il mettra en voix de nouveaux poèmes de son cru et des textes de poésie élémentaire proches de la tautologie. Emmené par Laurence Rioux, Didier Roux, Jean Marie Champagne et Sébastien Lespinasse, le Lohengrin Cabaret Ensemble élaborera un tissage rythmique de voix à partir de textes rares du XVIe siècle, précurseurs du surréalisme et d’auteurs contemporains tels que Novarina. Parmi d’autres invités, Marc Perrin improvisera un travail verbal à partir de matériaux visuels, et Olivier Toulemonde créera une musique concrète à base de ressorts et autres objets. Partenaire des Bruissonnantes, les éditions d’écritures contemporaines Plaine Page publieront une version papier et disque des deux éditions du festival.
Sarah Authesserre
Une chronique du mensuel Intramuros
Du jeudi 21 au samedi 23 mars, 21h00, au Théâtre Le Hangar, 11, rue des Cheminots, Toulouse.
Tél.: 05 61 48 38 29.