En visite au Théâtre national de Toulouse qui lui consacre un cycle de spectacles et de lectures, Christophe Honoré met en scène les auteurs du Nouveau Roman dans une création collective présentée l’été dernier au Festival d’Avignon.
Les «Regards» du Théâtre national de Toulouse rassemblent chaque saison des spectacles autour d’un artiste ou d’une thématique. Le premier «Regards» de cette nouvelle saison est dédié à Christophe Honoré. D’abord romancier, il est devenu cinéaste depuis une douzaine d’années : on lui doit notamment « 17 fois Cécile Cassard » tourné à Toulouse avec Béatrice Dalle, « les Chansons d’amour » avec Louis Garrel, « Non ma fille tu n’iras pas danser » avec Chiara Mastroianni, « Les Bien-aimés » avec Catherine Deneuve et Ludivine Sagnier. Il s’est également lancé dans l’écriture de textes pour le théâtre, et aborde la mise en scène avec la pièce de Victor Hugo « Angelo, tyran de Padoue » vue en 2009 au Festival d’Avignon.
Déjà présentées cet été au Festival d’Avignon, on verra simultanément à Toulouse deux pièces dont il est cette fois l’auteur. Il a lui-même mis en scène l’une d’elle, « Nouveau Roman » : une création collective dont les personnages sont les auteurs du Nouveau Roman, ce courant littéraire immortalisé par une photo de groupe prise devant les Éditions de Minuit en octobre 1959. On y reconnait Alain Robbe-Grillet, Jérôme Lindon, Samuel Beckett, Nathalie Sarraute, Claude Mauriac, Robert Pinger, Claude Simon et Claude Ollier.«Manquaient à l’appel Michel Butor et Marguerite Duras. Dans ces années-là, un jeune écrivain était bien plus célèbre et lu que tous ces écrivains réunis, c’est Françoise Sagan», note Christophe Honoré qui a souhaité la représenter aussi sur le plateau. Le résultat est le fruit d’improvisations de dix acteurs – dont Ludivine Sagnier et Brigitte Catillon – à partir des livres, articles, entretiens radiophoniques et télévisés. Libérée du carcan de la vraisemblance, cette variation fantasmée sur des figures majeures de l’histoire littéraire est un moment de théâtre imprévisible et joyeux à apprécier sur le grand plateau du TNT.
Dans la petite salle du théâtre, Éric Vigner présente au même moment sa mise en scène d’une pièce commandée à Christophe Honoré. « La Fabrique » a été écrite pour les jeunes acteurs de L’Académie du CDDB-Théâtre de Lorient – dont Vigner est le directeur. Sept jeunes acteurs originaires du Maroc, de Corée du sud, de Roumanie, d’Allemagne, de Belgique, du Mali et d’Israël portent cette tragédie contemporaine dont l’action est située au cœur d’une université française.
Le metteur en scène raconte :«Christophe a écrit « la Faculté » juste avant que ne commencent les auditions pour construire l’équipe de l’Académie. Il savait seulement qu’ils auraient entre vingt et trente ans. L’élan amoureux qui agite les jeunes personnages de « la Faculté » pourrait être considéré comme romantique, hugolien, puisque cet élan va les mener à la mort. Au fond, on parle toujours de la même chose… « La Faculté » pourrait être le scénario d’un film. C’est une pièce intime, sociale, politique et contemporaine, une sorte de cri de la jeunesse qui explose silencieusement dans une atmosphère très particulière de nuit et de neige, étrangement sombre et lumineuse à la fois. Elle traite de l’échange amoureux, sexuel, des deals et qui se cristallise autour du meurtre d’Ahmed. Dans un premier temps, on pense à un crime raciste, mais on découvre ensuite qu’il l’est doublement puisqu’il s’agit d’un crime homophobe. Et sur ce drame viennent s’agréger les thèmes du secret, de la famille, de la fratrie.»
Jérôme Gac
Spectacles :
« Nouveau Roman », du mardi 23 au vendredi 26 octobre ;
« La Faculté », du mercredi 24 au vendredi 26 octobre.
Lectures :
« J’élève ma poupée », de C. Honoré (Editions Ecole des Loisirs, 2010), par les comédiens de « Nouveau Roman », mardi 23 octobre, 14h30;
« Chroniques de cinéma », de C. Honoré (Editions Cahiers du Cinéma, 1998), par Emmanuel Daumas, mercredi 24 octobre, 18h00;
« Dionysos », de C. Honoré (2005), par les comédiens de « Nouveau Roman », vendredi 26 octobre, 18h00.
Au TNT, 1, rue Pierre-Baudis, Toulouse. Tél. 05 34 45 05 05.