Annoncées au Théâtre Garonne, les représentations de « Gólgota Picnic » font l’objet de menaces de la part de groupes politiques constitués de catholiques intégristes et violents.
Installé en Espagne, l’auteur et metteur en scène argentin Rodrigo García revient au Théâtre Garonne avec sa dernière pièce. « Gólgota Picnic » montre un monde suspendu à sa consommation, où l’art n’est plus qu’un ornement. À travers la peinture, de Goya à Rubens, il interroge le cours du temps et de l’histoire. Son écriture est croisée avec la virtuosité de Marino Formenti qui interprète l’intégralité de la version pour piano des « Sept dernières paroles du Christ sur la croix », de Haydn. «Je ne m’attarde pas sur l’Eglise, non. J’essaie de faire de la poésie avec les corps des acteurs, la musique jouée chaque soir, et le texte que j’ai écrit. Il y a un ange déchu qui parle: il explique qu’il ne peut pas apporter le mal sur la terre, parce qu’il y a déjà tout le mal planifié et consommé par les hommes… Dans mon texte, même le démon en personne a peur des hommes», précise le metteur en scène.
Or, comme d’autres théâtres en France, le Théâtre Garonne subit depuis plusieurs semaines des pressions visant à annuler les représentations de « Gόlgota Picnic ». Directeur du théâtre toulousain, Jacky Ohayon réagit à ces menaces dans un communiqué : «Ce spectacle a été présenté pendant cinq semaines au Centre dramatique national de Madrid, puis dans plusieurs villes européennes, sans aucun incident. Une autre œuvre est visée par cette campagne : « Sur le concept du visage du fils de Dieu », de Romeo Castellucci, présentée ces jours-ci au Théâtre de la Ville à Paris qui subit des attaques sans précédent. Ce mouvement est initié notamment par l’Institut Civitas qui se définit comme un «mouvement politique inspiré par le droit naturel et la doctrine sociale de l’Église et regroupant des laïcs catholiques engagés dans l’instauration de la Royauté sociale du Christ sur les nations et les peuples». L’Institut Civitas accuse – sans fondement – « Gόlgota Picnic » d’offenser la figure du Christ et la religion catholique, qualifiant le spectacle de «blasphématoire». Ce faisant, il dénie le droit inaliénable à la liberté d’expression qui s’inscrit dans le cadre de la loi. La violence et la haine déclenchées, au-delà de l’inquiétude légitime qu’elles suscitent, appellent en retour une responsabilité citoyenne. Le Théâtre Garonne, solidaire des théâtres visés, revendique par ailleurs pleinement les raisons artistiques qui l’ont amené à programmer le spectacle de Rodrigo Garcia, qui sera montré à Toulouse aux dates prévues».
Les représentations se dérouleront du 16 au 20 novembre au Théâtre Garonne qui vient de constituer un comité de soutien.
Jérôme Gac