40 ans après, Disney réactive « Tron » et propose un spectacle époustouflant qui ne fait pas l’économie d’une réflexion pertinente sur l’intelligence artificielle et l’usage qui peut en être fait, bon ou mauvais.

Ares (Jared Leto), guerrier informatique en pleine humanisation. Photo Disney
Depuis plusieurs années, les circuits de cinémas misent sur les salles « premium », à savoir celles qui, outre le plus grand confort, offrent la meilleure image et le meilleur son. C’est le cas de l’Imax du Pathé Labège, du Dolby Cinéma du Pathé Wilson ou de la Ice du Mega CGR Blagnac. Le hic, c’est que de tels vaisseaux amiraux trimbalent le plus souvent à leurs bords des niaiseries US, déclinaisons boursouflées et poussives des univers de superhéros dont même les fans commencent à se lasser. « Tron : Ares » est une superbe exception à cette litanie de mauvais films. D’abord par son sujet, d’une actualité brûlante, résumant les enjeux liés à l’intelligence artificielle et l’usage qui en sera fait. Dans le film s’opposent deux visions de l’avenir, incarnées par deux sociétés informatiques, Uncom et Dillinger, en guerre ouverte. La première, qui a fait fortune grâce aux jeux vidéo, cherche à pérenniser et à rendre concrètes des créations virtuelles afin d’améliorer la santé des gens et de lutter contre la faim dans le monde (bon, dit comme ça, cela fait un peu gnangnan). La seconde a pour projet des armes de destruction massive toujours plus sophistiquées. Les deux butent sur un code que seul peut leur révéler Kevin Flynn (Jeff Bridges), l’homme à l’origine de ces programmes informatiques, disparu depuis longtemps…
Dans le « ventre » d’un programme informatique
Le troisième volet de la série, qui nous donne des nouvelles de loin en loin (1982, 2010 et aujourd’hui) réussit à nous immerger, fidèle au propos initial, dans le « ventre » de programmes informatiques. De voir, par le biais de personnages robotisés, comment se matérialisent des attaques de hackers et les contre-feux mis en place dans l’urgence. Ce qui donne, grâce à l’évolution fulgurante des effets spéciaux, des scènes stupéfiantes de combats superbement chorégraphiés. Parfois, et c’est encore plus extraordinaire, les créations informatiques quittent leur monde chiffré pour venir semer le désordre sur Terre. On assiste par exemple, médusés, à une course-poursuite entre une moto classique et deux engins venus d’ailleurs aux performances inouïes. Ou comment revisiter un classique du cinéma d’action à la sauce technologique et nous clouer au fauteuil. « Tron : Ares » met aussi de l’humain dans les machines avec un « Maître contrôle » (Jared Leto) au service du méchant de l’histoire (Evan Peters) qui va peu à peu se libérer de l’emprise numérique pour faire le bien (et tomber amoureux de celle qu’il doit piéger, incarnée par Greta Lee).
Transe électronique avec Nine Inch Nails
Mis en scène par le Norvégien Joachim Ronning, dont le seul titre de gloire est d’avoir coréalisé un médiocre épisode de « Pirates des Caraïbes », « Tron : Ares » impressionne donc par son efficacité. Son atmosphère oppressante doit aussi beaucoup à la musique du groupe Nine Inch Nails (Trent Reznor et Atticus Ross), qui procure une sorte de transe électronique, renforcée par le son énorme du Dolby Cinéma. L’univers visuel de ce film hors norme, dont on imagine l’immense complexité du tournage et de la post-production (facilités par l’IA?), est une nouvelle occasion pour le directeur de la photo Jeff Cronenweth (« Gone Girl », « The Social Network ») de montrer sa diabolique excellence.
Prêt pour un voyage, fascinant et terrifiant, dans le futur ?
« Tron : Ares », de Joachim Ronning, actuellement au cinéma.