La pop féminine émergente forme une constellation de plus en plus scintillante dans l’Hexagone. Parmi ses plus brillantes étoiles, on retrouve la chanteuse Olympe Chabert. Signée depuis quelques années sur le label de Bigflo et Oli, la jeune femme gravit un sommet après l’autre. Son premier EP, « Haut les cœurs », annonce déjà un parcours prometteur. Rencontre avec la plus toulousaine des Parisiennes.
Culture 31 : Très jeune, tu t’inities au violoncelle, à la guitare, au chant lyrique, au théâtre… Quels souvenirs gardes-tu de ces premiers pas dans l’art et la musique ?
Olympe Chabert : Au début, c’étaient plus des activités d’enfants. J’aimais faire plein de choses différentes. J’aimais le sport, la musique, chanter… C’était un petit peu flou. Cette idée d’en faire tout le temps, d’en faire mon métier, s’est dessinée au fur et à mesure.
Tu as étudié la comédie musicale au Conservatoire de Paris pendant deux ans. Quel a été le meilleur conseil ou enseignement que tu as pu recevoir pendant ces années-là ?
Je me souviens de plein de choses même si c’est un peu dilué. Déjà, j’ai l’impression que tout ce que j’ai appris au Conservatoire, et ensuite au Cours Florent, ça m’a beaucoup aidée pour mon projet. Parce qu’il y a beaucoup de choses similaires, même si je défends un projet à moi et pas une pièce, ou quelque chose qui a été écrit par quelqu’un d’autre. Ce que je retiendrais, c’est que le plus important, c’est de transmettre une émotion. Qu’elle soit imaginée par nous ou par quelqu’un d’autre, tant qu’elle est transmise au public, c’est l’essentiel.
En parallèle, tu postais des reprises sur YouTube. C’est comme ça que tu as été repérée par Bigflo et Oli, qui te signent sur leur label en 2021. À ce moment-là, est-ce que tu réalises que ta carrière dans la musique prend un tournant, ou pas encore ?
Je faisais déjà de la musique avant d’être signée chez Bigflo et Oli. J’avais sorti deux titres en indé. Mais le fait de signer avec eux, ça m’a apporté une structure un peu plus stable. Après, j’ai signé avec un tourneur, Bleu Citron, et j’ai commencé à faire des concerts, chanter mes propres chansons… C’est à ce moment-là que je me suis rendue compte que ça prenait un tournant. Je pouvais enfin jouer et rencontrer les gens qui m’écoutaient. Ça a tout changé ! Donc c’est la scène qui m’a fait réaliser davantage. Le travail du label, c’était surtout de m’apporter ce sentiment d’être accompagnée et soutenue par quelque chose d’un peu plus structuré, avec plus de moyens et une vraie expertise de leur part. C’était super aussi.
Au début, tu sors différents singles. La plupart parlent d’amour. Fais-tu partie de ces personnes que l’on dit « amoureuses de l’amour » ?
Je ne sais pas. J’ai l’impression que ce sujet est surtout facile à mettre en chanson. Parce que les émotions sont assez fortes, et qu’on a souvent envie de les sortir. On a tellement entendu ce sujet-là que, finalement, c’est plus facile à ressortir à notre tour. J’ai moins de mal à écrire sur l’amour que sur mes relations familiales ou amicales, comme j’entends beaucoup d’artistes en parler. Par mimétisme, on va facilement vers là. Je pense qu’il y a beaucoup de mes chansons qui viennent de la même inspiration, ou parfois de la même histoire, mais il y a tellement de choses qui se passent quand on est amoureux, ou plus amoureux, qu’on peut faire 100 chansons avec la même émotion. C’est ce qui est bien avec l’amour, c’est inépuisable comme sujet.
Cette année, tu as dévoilé ton premier EP, « Haut les cœurs », dans lequel on retrouve le morceau « Le silence », qui parle d’une rupture amicale. Tu l’as chanté avec beaucoup d’émotion au Rex le 25 octobre dernier. Dirais-tu que c’est le morceau de ton registre le plus difficile émotionnellement à interpréter en live ?
Je pense que oui. Parce que c’est un sujet qui a été dur à mettre en chanson. J’ai l’impression qu’il y a des enjeux un peu plus complexes. Les histoires d’amour, on s’attend à ce que ce soit transformé en art, parce que c’est un peu l’ordre des choses. On sait que les artistes vont se servir de ça et que ça n’est pas très grave. Mais les histoires d’amitiés – quand il y a eu des blessures et qu’on s’est fait du mal mutuellement – je trouve que c’est plus délicat d’en faire de la musique. J’ai pu avoir l’impression de me servir de quelque chose qui avait été douloureux et de le brandir. Alors j’ai mis du temps à me détacher de ça. À me dire que j’avais le droit de sortir ces émotions pour l’utiliser dans ma musique, au même titre que les histoires amoureuses. De toutes façons, il n’y a que ça qu’on peut faire quand on est artiste et qu’on a besoin de sortir quelque chose de nous, pour en guérir. Et si, en plus, ça peut aider des gens après, ou que certaines personnes peuvent s’identifier et être plus apaisées, tant mieux. Il faut se débarrasser de la culpabilité.
À la fin du morceau, tu dis « J’aimerais t’envoyer un message mais j’en suis incapable ». À la place, tu as écrit cette chanson. C’est finalement une manière de taper ces mots sans avoir à cliquer sur « envoyer ».
Oui, c’est vrai, mais je ne sais pas à quel point la chanson à voyagé jusqu’aux oreilles concernées. En tout cas, pour moi, ça a apaisé quelque chose mentalement.
Dans le morceau « 92 75 », tu racontes cette fois ton adolescence entre la banlieue et Paris. Ici, tu surprends l’auditeur avec quelque chose de plus rap que d’habitude. Est-ce une facette musicale que tu comptes développer davantage à l’avenir ?
J’ai pas d’envie particulière à développer. Je fais plutôt en fonction des compositions. Là, instinctivement, j’ai eu envie de mettre une teinte un peu plus rap, même si ça reste très pop, sur ce deuxième couplet. Mais ça ne veut pas dire que je vais ouvrir une voie rappée dans le futur, même si ça peut arriver sur n’importe quel morceau. Je me laisse un peu porter par le moment. Même sur l’intro du projet « Haut les cœurs », «De bonnes chansons», j’ai utilisé ce côté un plus parlé, ce qui n’empêche pas des chansons très pop comme «Toute seule» à la fin. Au final, je pense que tout peut coexister.
Tu sembles également aimer travailler en featuring. On te retrouve notamment sur les titres « Tant pis ou tant mieux » de Bigflo & Oli et « Play it cool » de Sika Deva. Qu’est ce qui te plaît dans ce processus de création à plusieurs mains et plusieurs voix ?
Ce que j’aime bien, c’est qu’on peut toujours apporter quelque chose à l’univers des autres et inversement. Dès fois, j’ai une chanson qui est terminée, et je me dis qu’il manque quelque chose. Mais ce n’est pas moi qui peut apporter cette chose manquante. C’est un autre cerveau pour y réfléchir, et une autre sensibilité pour mettre une touche finale. Ça peut aussi venir de l’envie de collaborer avec un ou une artiste. Se retrouver en studio et partir de rien, voir ce que deux personnes différentes peuvent donner ensemble, c’est le plus intéressant et le plus surprenant. Parfois, il y a des choses qui en ressortent auxquelles on ne s’attendait pas du tout. C’est très chouette.
Lors du concert au Rex, tu as dit que Toulouse était ta ville d’adoption. Qu’est ce qui t’a séduit dans la Ville rose ? Y passes-tu beaucoup de temps ?
En fait, j’ai de la famille à Toulouse, mes cousins et mon oncle habitent ici. Donc je connais la ville depuis longtemps. Je n’y allais pas pour de longues périodes, mais je l’ai toujours associée à une ville familiale où j’avais des attaches. Après avoir signé avec Flo et Oli, j’ai fait pas mal d’allers-retours. Par exemple, j’ai fait les trois éditions du Rose Festival, et j’ai joué pour deux d’entre elles. Et c’est aussi le fait de faire un peu de studio à Toulouse et d’avoir des réunions qui me permet de m’y balader et de rencontrer des gens. Je me sens à l’aise dans cette ville et j’ai l’impression qu’elle est très accueillante. C’est agréable d’y être, et le public de Toulouse a toujours été hyper bienveillant, donc naturellement j’ai envie de revenir. Que ce soit pour les concerts ou autre chose.
Pour finir, as-tu un projet d’album en cours ?
En fait, le projet qui est sorti, « Haut les cœurs », c’est un peu un album déstructuré. Il y a un premier EP, celui-ci qui vient de sortir, et puis la partie 2 qui devrait arriver à la rentrée, courant janvier. Quand on les met tout bout-à-bout, ça fait comme un album, car beaucoup de titres se répondent. Il y a une certaine cohérence. Ça n’a pas été tout à fait construit, ni sorti comme un album, mais on peut considérer que ça fait partie de cette famille des albums. En tous cas, c’est un projet qui existe, et c’est le premier que j’ai sorti, donc c’est déjà un grand pas pour moi. Mais évidemment, je n’arrête pas d’écrire ou d’avoir envie de sortir des choses. Donc on peut s’attendre à d’autres projets, albums ou EP, qui verront le jour plus tard.
Propos recueillis par Inès Desnot